Dans l’atelier de Claude de Soria
221 Boulevard Raspail, Paris 14ème
Née en 1926 à Paris, Claude de Soria se réfugie dans le Sud pendant la guerre et embarque en 1943 pour la Tunisie à Sidi Bou Saïd où elle termine ses études secondaires.
De retour en France, Claude de Soria étudie la gravure pendant six ans au sein des Beaux-Arts de Paris à l’atelier de Robert Cami, chef d’atelier de gravure en taille-douce. Dès 1948, elle suit les cours de dessin d’André Lhote à l’Académie de la Grande Chaumière à Paris, fondée en 1904 par les Suissesses Martha Stettler et Alice Dannenberg et dédiée à la fois à la peinture et à la sculpture. Puis, en 1950, elle assiste à ceux de l’atelier de peinture de Fernand Léger avant d’apprendre la sculpture avec Ossip Zadkine en 1952. Elle effectue pour les éditions Julliard de nombreuses illustrations.
Les années suivantes, Claude de Soria lit, se rend à des concerts, visite les musées de France. Elle parcourt l’Espagne et l’Italie. Elle enregistre ses impressions dans des carnets de croquis, où l’on retrouve des instantanés de la Feria de Cordoue, du Palio de Sienne, des détails de sculptures, de chapiteaux et de tableaux. Elle découvre Pisano et Michel-Ange.
Ses premiers travaux, en terre cuite, sont exposés à la galerie Claude Bernard de Paris en 1965. Au cours de cette période, Claude de Soria travaille la terre glaise. En 1972, les reliefs naturels qu’elle découvre lors d’un voyage au Sahara provoqueront en elle comme un séisme intérieur.
Un déclic se produit en 1973, le jour où elle trouve par hasard un demi-sac de ciment oublié par des ouvriers dans la cour de son atelier. Elle travaille ce matériau à la couleur gris bleuté sur une plaque de miroir. En le démoulant, elle découvre son envers si lisse et si vivant, intense, parcouru par des ondes, des bulles d’air. Attirée par cette transformation de la matière, elle travaillera sur ces «envers» où se concentrent tous les accidents destinés à ne pas être exposés aux regards. Dès ce moment, elle comprend le parti qu’elle peut tirer d’un matériau volatil, malléable, aisé à malaxer, à amalgamer.
« Je mélange du ciment, du sable et de l’eau dans une cuvette ronde. Je la mets sous le robinet, je verse de l’eau et je «touille» jusqu’à ce que cela ait l’épaisseur voulue. En général je recherche toujours la même épaisseur, le même mélange. Ensuite je prépare une feuille de plastique souple et relativement épaisse, que je place sur une sellette. Je renverse ma cuve dessus comme les enfants renversent leur pot de sable sur la plage. La flaque de ciment assez épaisse s’étale ; je l’aide à s’étaler très lentement, en tapant dessus avec une truelle très doucement pour ne pas gêner son mouvement naturel. Comme la forme de la cuvette est ronde, ça continue à s’étaler en rond. Je laisse sécher environ 48 heures. Ensuite je retourne l’ensemble, soulève la plaque de plastique et j’ai deux résultats. » explique-t-elle à Philippe Cyroulnik dans l’entretien qu’elle lui a accordé en 1979.
Elle crée d’abord des coulées sur du Rhodoïd (matière plastique ; Plaques, 1974-1975), puis elle réalise des empreintes sur papier, qui sont de précieux disques, presque des symboles planétaires dans leur composition minérale. Du remplissage de demi-sphères en plastique préfabriquées et assemblées par deux naissent les Boules en deux parties (1976-1978). Plus tard, en recherchant la verticalité, elle coule du ciment dans des tubes et réalise des séries comme les Lames et les Contre-lames (1984-1985), avant de retourner au cercle et de réaliser les Ouvertures en 1987 : des ronds troués aux bords dentelés.
Elle fût l’épouse du collectionneur d’art André Bernheim, et la mère de l’écrivaine Emmanuèle Bernheim et de Pascale Bernheim. Elle meurt le 7 août 2015. En 2021, François Ozon réalise un film tiré du roman de sa fille Emmanuèle « Tout s’est bien passé ». C’est Charlotte Rampling qui joue le rôle de Claude de Soria.
Son atelier situé Boulevard Raspail a ouvert ses portes au public en janvier 2022.
En savoir plus
Copyright humanitelles
Claude de Soria
Annalisa Rimmaudo
Extrait du Dictionnaire universel des créatrices
© Éditions des femmes – Antoinette Fouque, 2013
Aware, Archives of Women Artists, Research and Exhibitions
Claude de Soria
Wikipedia
Claude de Soria, 1926 – 2015
Jeanne Bucher Jaeger
Claude de Soria, alter ego du ciment
Virginie Chuimer-Layen
La Gazette Drouot, 20 janvier 2022 (Abonné.e.s)
Dans l’atelier de Claude de Soria, sculptrice lunaire et minimaliste méconnue
Laurent Boudier
Télérama, 16 mars 2022 (Abonné.e.s)
Vidéo. Claude de Soria, « Je suis ciment »
By Béton, 17 février 2021, Youtube, 2’07
Claude de Soria, sculpteur
Documentaire réalisé par Michelle Porte, 1995, 26′
DAP – Délégation aux Arts Plastiques, Collection Centre Georges Pompidou : DAP – CNAP Centre National des Arts Plastiques – Ciments Lafarge Coppée, 1994
Entretien avec Claude de Soria
Propos recueillis par Philippe Cyroulnik en 1979
À Montparnasse, l’atelier caché d’une oubliée de la sculpture : Claude de Soria
Inès Boittiaux
Beaux Arts, 11 mai 2022
L’atelier de l’artiste Claude de Soria s’ouvre à la visite Quartier Montparnasse, Paris
Signes & sens
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