
Je vous propose de visiter l’exposition Parisiennes citoyennes ! qui s’est tenue au Musée Carnavalet du 28 septembre 2022 au 29 janvier 2023 avec en main le livre de Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », paru chez Points Histoire en 2008. L’exposition et l’ouvrage nous emmènent dans le sillage de femmes dont les combats ont conduit à l’émancipation. Les encarts « Voir aussi » donnent accès à des sources qui, à défaut d’être exhaustives, vous permettront de poursuivre votre exploration.
Les textes qui ne sont pas ceux de Michelle Perrot sont tous issus de l’exposition. Les références sont le fruit de mes recherches et les photos sont celles que j’ai prises. ©humanitelles.
- De la Révolution à la Commune : le temps des utopies (1789-1871)
- Droits des femmes et République (1871-1914)
- D’une guerre à l’autre : ambivalences de la modernité (1914-1939)
- De la Résistance à mai 68 : entre deux vagues (1939-1968)
- Le temps du mouvement de libération des femmes (1970-2000)
- Militantes
- « Notre corps nous appartient »
- Et les Gouines rouges sont arrivées…
- Contre le viol et les violences
- « D’ici et d’ailleurs » : femmes exilées, femmes immigrées, femmes noires
- Les mobilisations de travailleuses
- Exister dans les assemblées élues
- Cultures féministes
- Les féministes et l’espace public parisien
- Sororité

En 1973, Michelle Perrot donne, avec Pauline Schmitt et Fabienne Bock, un premier cours intitulé « Les femmes ont-elles une histoire ? ». Poser cette question et écrire leur histoire, c’est les sortir du silence et de l’invisibilité qui, pour beaucoup de sociétés, font partie de l’ordre des choses. Ce silence est aussi lié à celui des sources mais également et surtout à celui du récit de l’histoire. Cette histoire des femmes advient en Grande-Bretagne et aux États-Unis dans les années 1960 et 10 ans plus tard en France. Cette émergence s’explique par différents facteurs :
– des facteurs scientifiques : l’histoire renoue avec l’anthropologie et redécouvre la famille, par ce biais, elle saisit la dimension sexuée des comportements ;
– des facteurs sociologiques : la présence des femmes à l’université, comme étudiantes et enseignantes ;
-des facteurs politiques : le Mouvement de libération des femmes (MLF), bien qu’ayant d’autres soucis que l’histoire, s’appuyait sur des intellectuelles et a eu des effets de savoir, au moins de deux manières. Il a initié un travail de mémoire et il a critiqué les savoirs constitués, qui se donnaient comme universels en dépit de leur caractère souvent masculin.
Ainsi naquit le désir d’un autre récit, d’une autre histoire.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.
De la Révolution à la Commune : le temps des utopies (1789-1871)
(Source : Parisiennes citoyennes ! Engagements pour l’émancipation des femmes (1789-2000)
En quoi les grandes ruptures modifient-elles les frontières des sexes ? se demande Michelle Perrot.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.
1789, 1830, 1848, 1871 : les Parisiennes sont des actrices importantes de tous les bouleversements politiques que connaît la capitale. En dépit de leur engagement dans les révolutions qui scandent une histoire mouvementée, elles peinent à se faire entendre.
Certes, un nouvel horizon se dessine avec la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Et les citoyennes ? rétorque Olympe de Gouges. En effet, dans Paris en révolution, les femmes qui s’engagent sont nombreuses. Elles s’organisent, animent salons ou clubs, demandent plus d’instruction, et, pour les plus audacieuses, envisagent une égalité politique complète. Le mariage civil et le divorce favorisent l’émancipation. Mais très vite, le retour à l’ordre patriarcal, étayé par le Code civil napoléonien, freine le mouvement, sans parvenir à éteindre l’espérance d’émancipation. Les brèches que sont les révolutions de 1830 et de 1848 ainsi que la Commune ouvrent le champ des possibles pour les Parisiennes éprises de justice.
Elles sont saint-simoniennes, femmes de 1848 ou femmes de la Commune : vaincues en leur temps, honorées aujourd’hui.
Parisiennes en Révolution
L’universalisme de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ne concerne pas vraiment les femmes : elles ne sont pas des individus. La Révolution leur accorde pourtant des droits civils, mais aucun droit politique. C’était une rupture avec la plupart des coutumes, en particulier la coutume normande qui ne reconnaissait aux femmes aucun droit. La Révolution a détrôné le père, comme elle a tué le roi. Mais elle a exclu les femmes de l’exercice de la politique, à commencer par le droit de vote. Elles sont toutes « citoyennes passives », aux côtés des mineurs, des étrangers, des plus pauvres et des fous. « Du moins, dans l’état actuel », disait Sieyès, organisateur du suffrage. Et c’était, il est vrai, l’expression d’un doute, que peu d’hommes – excepté Condorcet – partageaient. Une porte entrebâillée, dans lequel le féminisme allait s’engouffrer.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.
Dans Paris, ville majoritairement féminine (54 %), les femmes participent activement à la Révolution dans les foules, les assemblées, les clubs, les fêtes civiques, les salons… Leur contribution se situe parfois dans le prolongement de leurs rôles traditionnels (nourricier, éducatif, philanthropique, par exemple) mais pas toujours : l’événement est marqué par leur intense politisation et des engagements inédits. Elles sont désormais « citoyennes ».
Pendant cette période, si elles n’acquièrent pas de droits civiques, et notamment le droit de vote et d’éligibilité, elles gagnent tout de même du pouvoir et de l’autonomie au sein de la famille : la capacité juridique, le mariage civil, le divorce, l’égalité successorale.

Demande des femmes aux États généraux par l’auteur des « Femmes comme il convient des les voir », 1789
Madame de Colcy (17..-1841)
Citoyennes

Il existe des femmes qui protestent : ces citoyennes tricoteuses. Femmes du peuple, urbaines, parisiennes surtout, qui harcèlent les hommes dans les tribunes de l’Assemblée, tout en tricotant pour signifier qu’elles n’abandonnent pas les « devoirs de leur sexe » qu’on a tant reproché à Olympe de Gouges d’avoir négligés. Une minorité assurément : la majeure partie des femmes, paysannes, artisanes, ménagères, étaient indifférentes, voire hostiles à la Révolution qui dérangeait le cours ordinaire des choses et portait atteinte à la religion, qu’elles pratiquaient plus que les hommes. Mais quelle éclatantes et bruyante minorité que ces femmes des clubs, ces clubs fermés par les jacobins.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.
Être citoyenne, c’est avoir des droits politiques (le droit de vote, le droit d’être élue, la liberté d’opinion, de réunion et d’association), mais aussi des droits civils (se marier librement, divorcer et hériter). Dans l’histoire politique de la capitale, les Parisiennes participent à toutes les révoltes ! Elles créent des salons et des clubs de citoyennes pour défendre leurs idées. Parce que la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 exclut les femmes des droits politiques, Olympe de Gouges rédige la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne.
Olympe de Gouges, actrice et écrivaine, auteure de pièces de théâtre contre l’esclavage des Noirs, à jamais illustre pour avoir écrit la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne en 1791. Ce texte, dédié bien imprudemment à Marie-Antoinette, est presque contemporain de celui de Condorcet, Sur l’admission des femmes au droit de cité (1790). S’il est plus dramatique, il est plus précis, en dix-sept articles d’une grand modernité, dont le fameux article 10 : « La femme a le droit de monter à l’échafaud ; elle doit avoir celui de monter à la tribune ». Olympe de Gouges montera en effet à l’échafaud deux ans plus tard, en 1793, en même que Mme Roland.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.
Voir aussi :
Olympe de Gouges
Wikipedia
Audio. Série. « La Nuit des féminismes 1/2 : Quelques pionnières… » : Épisode 2/10 : Olympe de Gouges : « La femme a le droit de monter à l’échafaud, elle doit avoir également celui de monter à la tribune »
Les Nuits de France Culture, France Culture, 6 janvier 2022 (1ère diffusion 7 février 2021), 54′
Audio. Série « Les femmes et le pouvoir » : Épisode 2/5 : Olivier Blanc : « Olympe de Gouges voulait donner de la respectabilité à l’engagement politique des femmes »
Les Nuits de France Culture, France Culture, 8 mars 2023 (1ère diffusion le dimanche 12 juin 2022), 32′
Video. Olympe de Gouges | Pionnières
in La littérature en Révolution, BnF, Les essentiels
Olympe de Gouges et la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne
Martine Reid
in La littérature en Révolution, BnF, Les essentiels, 2015

Olympe de Gouges (1748-1795). « Le bon sens du François », 1792.
Imprimerie Du Pont. Affiche. Bibliothèque de l’Assemblée nationale.
Olympe de Gouges envoie de nombreux libelles à l’Assemblée, et ses affiches sont collées et discutées dans les rues de Paris. En 1791, en plein débat sur la Constitution, elle réplique à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen par une Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne. Celle qui écrivit « La femme a le droit de monter à l’échafaud ; elle doit avoir également celui de monter à la tribune » est guillotinée le 3 novembre 1793 pour avoir exprimé son opposition au cours pris par la révolution. Il lui sera reproché d’avoir voulu « être homme d’État » et d’avoir « oublié les vertus qui conviennent à son sexe ».
Portrait présumé de Manon Roland, vers 1793
Anonyme
Peinture – Musée d’art et d’histoire Paul Eluard, Saint-Denis
Issue de la bourgeoisie parisienne, Manon Roland, femme des Lumières, tient un salon politique réservé aux hommes. Elle estime que les mœurs [ne] permettent [pas] encore aux femmes de se montrer; elles doivent inspirer le bien et nourrir, enflammer tous les sentiments utiles à la patrie, mais non paraître concourir à l’œuvre politique ». Elle est guillotinée le 8 novembre 1793 pour crime d’influence. Il existe plusieurs portraits présumés de Manon Roland qui témoignent de sa popularité.

Voir aussi :
Manon Roland
Wikipédia
Madame Roland, une femme en révolution
Caroline Fayolle
EHNE (Encyclopédie d’histoire numérique de l’Europe)
Mémoires
Roland, 1793
Gallica, Les essentiels Littérature

Institutrice républicaine, vers 1789 – Anonyme – Estampe
Musée Carnavalet – Histoire de Paris
La grande régression
La Révolution s’achève dans un climat de recul des libertés pour les femmes.
La Première République interdit en 1793 aux femmes de se grouper dans des clubs puis, à la suite d’émeutes, en 1795, de se rassembler à plus de cinq dans la rue et d’assister à des assemblées politiques.
La crainte des mouvements populaires de citoyennes est à son comble. Chaque sexe doit rester à « sa place ». Le risque de confusion est conjuré par le renouvellement de l’interdiction du travestissement.
En 1804, le code civil napoléonien inscrit dans le marbre la domination masculine : la femme mariée perd tous ses droits, sur elle-même et sur ses enfants.
Dans le Code pénal de 1810, l’avortement est puni comme un crime et le meurtre commis par le mari sur l’épouse infidèle jugé excusable. Le droit au divorce est restreint.
La Restauration (1815-1830) parachève ce retour en arrière, en supprimant notamment le divorce.
La Monarchie de Juillet
Le 27 juillet 1830, Paris se couvre de barricades lorsque Charles X décide, entre autres, de supprimer la liberté de la presse et de limiter le corps électoral. Dans une atmosphère de guerre civile, le peuple insurgé, dont de nombreuses femmes, réclame une Charte, c’est-à-dire un changement de Constitution, en brandissant le drapeau tricolore.
À l’issue de cette révolution, ce n’est plus un roi de France qui monte sur le trône mais un roi des Français. Louis-Philippe est-il aussi le roi des Françaises ? La féministe saint-simonienne Louise Dauriat pose la question dans une pétition. Commence une période troublée, avec des libertés publiques retrouvées pour un bref moment, ouvrant un espace pour les revendications sociales et les espoirs d’émancipation. Tandis que la littérature, avec George Sand, porte un regard critique sur le « destin » féminin, les premiers mouvements socialistes forgent l’utopie d’un avenir égalitaire.

La présence des Parisiennes sur les barricades de 1830 fait l’objet de représentations qui visent à glorifier l’esprit révolutionnaire et ses visées émancipatrices. Sur la gravure, Delaporte figure des Parisiennes faisant preuve de courage patriotique, mais les représente élégantes, habillées et coiffées à la mode du temps. Pierre Manguin habille sa figure féminine de vêtements typiques des femmes du peuple des années 1830, mais la composition générale de la scène en fait une œuvre plus allégorique que réaliste.
Voir aussi :
Femmes et barricades
Sylvie Aprile
EHNE (Encyclopédie d’histoire numérique de l’Europe)
« Jeune Dame Saint Simonienne », planche n° 154 de la série Costume français, vers 1830. Louis Maleuvre, graveur (1785-18..), Hautecœur Martinet, éditeur. Estampe. Ville de Paris / Bibliothèque Marguerite Durand.
Ce costume inventé par le dessinateur, comprenant à la fois une tunique et un pantalon (le masculin et le féminin), permet de tourner en ridicule les ambitions égalitaires des saint-simoniennes. Leur engouement pour les idées de Prosper Enfantin, disciple de Saint-Simon, ne passe pas inaperçu. L’Appel à la femme libre, en 1831, prône la « régénération du genre humain par l’égalité de l’homme et de la femme ».

Voir aussi :
Les féministes saint-simoniennes. Possibilités et limites d’un mouvement féministe en France au lendemain de 1830
Christine Planté
In Regards sur le Saint-Simonisme et les Saint-Simoniens, édité par Jean-René Derré, Presses universitaires de Lyon, 1986, p. 73-102

Par une ordonnance du 16 brumaire an IX (7 novembre 1800), le préfet de police de Paris, Louis-Nicolas Dubois, soumet à autorisation « le travestissement » des femmes. En effet, « toute femme, désirant s’habiller en homme, devra se présenter à la préfecture de police pour en obtenir l’autorisation ».

Madame Flora Tristan, 1838 Aubert, imprimeur
Estampe- Musée Carnavalet-Histoire de Paris
« Je suis convaincue que tous les malheurs au monde proviennent de cet oubli et mépris qu’on a fait jusqu’ici des droits naturels et imprescriptibles de l’être femme » écrit Flora Tristan (1803-1844). Elle qui a connu la condition de femme pauvre et survécu à un féminicide parle d’expérience. Prônant une solidarité sans frontière, elle a enquêté, voyagé, notamment à Londres et au Pérou. A Paris, elle tient un salon, 100 bis, rue du Bac (actuel 7e arr.), donne des conférences et publie des plaidoyers pour l’union ouvrière universelle.
Voir aussi :
Flora Tristan
Wikipédia
TRISTAN Flora [TRISTAN Y MOSCOSO Flore, Célestine, Thérèse, Henriette], connue sous le nom de Flora Tristan, version mise en ligne le 27 janvier 2009, dernière modification le 1er mai 2021
Dictionnaire biographique Le Maitron, mouvement ouvrier, mouvement social
Audio. La vie, les écrits, « les pérégrinations d’une paria », féministe et socialiste avant l’heure : Flora Tristan
Dominique Desanti ; Stéphane Michaud Professeur émérite à l’Université de la Sorbonne-Nouvelle Paris 3
France Culture, 21 août 2019 (1ère diffusion 30 septembre 2018)
1 30′
La révolution de 1848
(Source : Parisiennes citoyennes ! Engagements pour l’émancipation des femmes (1789-2000)
Les révolutions du XIXème siècle sont autant de brèches dans les systèmes de pouvoir, favorables à la revendication latente de l’égalité des sexes. Ainsi en 1848, l’expérience la plus éclatante et la plus décevante à cet égard. En dépit des « femmes de 1848 » – Eugénie Niboyet, Désirée Gay, Jeanne Deroin – , de leurs journaux – La Voix des femmes, L’Opinion des femmes… – et de leurs clubs, caricaturés par Daumier et Gavarni, le « suffrage universel » ne concerne que les hommes, seuls représentants de la famille qui demeure l’unité de base, y compris dans l’ordre politique. Une exclusion renforcée du fait de l’indifférence du mouvement ouvrier et de la division des femmes. Ainsi, George Sand, si active en 1848, estimait comme ses amis républicains et socialistes que la question sociale était prioritaire et le droit de vote des femmes, prématuré, en raison de leur état de sujétion.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.
Dans l’effervescence révolutionnaire qui donne naissance à la Deuxième République, la brèche qui s’ouvre est immédiatement mise à profit par des Parisiennes qui s’engagent : femmes du peuple sur les barricades, anonymes dans les foules ; femmes d’influence, comme George Sand ou Pauline Viardot ; ou bien militantes de la citoyenneté des femmes, féministes et socialistes.
Le mot « féministe » n’existe pas encore, mais la réalité politique qu’il désigne est déjà présente sous la forme d’une aspiration collective à l’émancipation des femmes grâce à l’égalité des droits. Pétitions, clubs, presse : ces moyens désormais classiques sont utilisés. Contre un suffrage universel et un droit à l’éligibilité qui excluent la moitié de l’humanité, un nouveau moyen de protestation apparaît : la candidature féminine aux élections.
Voir aussi :
Audio. 1848, des femmes dans la Révolution
Autant en emporte l’histoire, France inter, 26 février 2017, 54′
Audio. Série « La Nuit des féminismes 1/2 : Quelques pionnières… » : Épisode 7/10 : Flora, Jeanne, Eugénie, Désirée et les autres…
Les Nuits de France Culture, France culture, 5 janvier 2022 (1ère diffusion 7 février 2021), 1 25′
Eugénie Niboyet
Wikipédia
NIBOYET Eugénie, née MOUCHON Eugénie. Notice revue et complétée par Luce Czyba, version mise en ligne le 26 janvier 2009, dernière modification le 10 novembre 2022
Dictionnaire biographique Le Maitron, mouvement ouvrier, mouvement social
Désirée Gay
Wikipédia
GAY Jeanne, Désirée, née Véret. Notice par Jacques Cana, version mise en ligne le 11 novembre 2018, dernière modification le 23 mars 2022
Dictionnaire biographique Le Maitron, mouvement ouvrier, mouvement social
L’absence de s à George est-il volonté androgyne ? Sans doute cherchait-elle à échapper à l’obscure cohorte des « femmes auteurs », pour s’inscrire dans le glorieux sillage des grands écrivains. En tout cas, elle endosse sa masculinité, du moins dans sa vie professionnelle, parle d’elle au masculin, se sent parfaitement à l’aise, seul femme, aux dîners Magny. Et, chose exceptionnelle, elle fait de son pseudonyme un patronyme qu’elle lègue à sa NIBOYET Eugénie, née MOUCHON Eugénie par Notice revue et complétée par
Luce Czyba, version mise en ligne le 26 janvier 2009, dernière
modification le 10 novembre 2022descendance.
L’écriture est, pour elle, un travail, « la pioche » comme elle dit à Flaubert, qu’elle accomplit avec conscience, surtout la nuit. Travail signifie identité, utilité. C’est aussi un moyen de gagner sa vie et de faire vivre une maisonnée qui allait bien au-delà des limites de la famille. Mais elle ne s’est jamais « enterrée en littérature ». Comme bien des écrivaines, elle refuse l’absorption de la vie par l’œuvre. Elle veut faire œuvre utile, au service de son idéal de justice sociale. La réception de son œuvre illustre aussi les difficultés de la reconnaissance. Son éclatant succès, en France et plus encore à l’étranger, n’empêche pas une critique misogyne féroce : un style « coulant », des œuvres inspirées, voir écrites par des hommes. Sans parler de la controverse politique autour de ses engagements (1848) ou de ses retraits (la Commune).
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.

Portrait de Mme Dudevant (George Sand), 1837-1839 Auguste Charpentier (1813-1880)
Peinture – Musée de la Vie romantique
Indiana, en 1832, puis Lélia font de George Sand (1804-1876) une femme de lettres célèbre, dont la vie et l’œuvre scandalisent. Passionnée par la vie politique, elle s’engage en 1848 pour une république démocratique et sociale et écrit dans plusieurs journaux, dont le sien : La Cause du peuple par George Sand. Sa priorité féministe est l’égalité dans le mariage, non l’obtention du droit de vote et l’éligibilité pour les femmes. Elle s’impose comme la grande figure féminine du siècle.
Voir aussi :
George Sand
Wikipédia
SAND George, baronne DUDEVANT, née DUPIN Aurore [DUPIN Armandine, Lucile, Aurore]. Pseudonyme littéraire : George Sand par Michelle Perrot, version mise en ligne le 26 janvier 2009, dernière modification le 5 octobre 2022
Dictionnaire biographique Le Maitron, mouvement ouvrier, mouvement social
George Sand en dialogue avec son siècle
Brigitte Diaz
Gallica, Les Essentiels Littérature
Audio. George Sand, vie singulière d’une auteure majuscule
5 épisodes
France Culture, du 31 juillet au 4 août 2017, 1 49′ chacun
Anne-Louise-Germaine Necker, dite Mme de Staël, entre 1818 et 1848.
Marie Éléonore Godefroid (1778-1849), d’après un portrait de François Gérard daté de 1815.
Tableau. Établissement public du château, du musée et du domaine national de Versailles.
Reconnue comme l’un des plus brillants esprits de son temps, Germaine Necker (1766-1817), fille du ministre des Finances de Louis XVI, est issue d’une famille protestante, riche et lettrée. Comme sa mère, elle se passionne pour la politique et crée, elle aussi, son propre salon libéral et progressiste. Malgré l’opposition paternelle, elle devient sous le nom de Madame de Staël romancière et essayiste, tout en menant une vie amoureuse très libre. Partie en exil en 1793, elle revient à Paris en 1795 et s’oppose à Napoléon.

Voir aussi :
Germaine de Staël
Wikipedia
Qui est Germaine de Staël ?
Société des études staëliennes
Si la presse féministe dans les années 1830 revendique des droits civils, la liberté sentimentale, amoureuse, sexuelle, « les journaux publiés en 1848 par Eugénie Niboyet, Désirée Gay, Jeanne Deroin sont plus politiques et sociaux. Cette presse revendique le droit au travail des femmes, l’égalité des salaires, la formation de coopératives ; et d’autre part, le droit de vote pour les femmes, dont on sait qui leur sera alors refusé. »
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.

La Voix des femmes est un journal féministe diffusé du 20 mars 1848 au 20 juin 1848, créé le 20 mars 1848 par l’écrivaine et journaliste Eugénie Niboyet, à la suite de l’abdication du roi Louis-Philippe Ier et du début de la Deuxième République.
Campagne électorale de la citoyenne Jeanne Deroin et pétition des femmes au peuple, 1849
Jeanne Deroin (1805-1894)
Affiche – Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, Histoire, Sciences de l’homme, FOL-LB55-505
Après l’élection de Louis Napoléon Bonaparte à la présidence de la République en décembre 1848, des élections législatives ont lieu en mai 1849. Institutrice féministe et socialiste, Jeanne Deroin présente sa candidature afin de dénoncer « le privilège qui laisse une moitié de la nation sous la domination de l’autre ». Son initiative est jugée « inopportune » et « inconstitutionnelle ». Elle dénonce le privilège qui « laisse une moitié de la nation sous la domination de l’autre ».

Voir aussi :
Jeanne Deroin
Wikipédia
DEROIN Jeanne, Françoise (souvent écrit, à tort, DEROUIN Jeanne). Notice revue et complétée par Michèle Riot-Sarcey, version mise en ligne le 20 février 2009, dernière modification le 1er avril 2019
Dictionnaire biographique Le Maitron, mouvement ouvrier, mouvement social
Le Second Empire
Dans le Paris du Second Empire, les engagements pour l’émancipation des femmes ne manquent pas et les féministes de plume répondent avec fermeté à leurs détracteurs.
À la faveur de la libéralisation des années 1860 resurgissent des initiatives concrètes de femmes progressistes, en particulier dans le domaine éducatif : elles créent les écoles maternelles, des cours secondaires et des formations professionnelles pour les jeunes filles. Le sort des femmes du peuple les indigne et les mobilise. Les pionnières des droits des femmes revendiquent l’émancipation économique et défendent l’idée qu’à travail égal, le salaire doit être égal. Cette idée est alors minoritaire dans le mouvement ouvrier français, sous l’influence de Proudhon, très hostile au travail féminin, facteur, selon lui, de « dégénérescence de la race ».
La vie quotidienne des femmes peintre n’était pas aisée. L’atelier est un monde d’hommes où elles ne sont admises que comme modèles. Et il n’est pas simple de planter son chevalet dehors. Pour le faire, et avoir le droit de porter un pantalon, Rosa Bonheur dut solliciter l’autorisation du préfet de police ; ses immenses toiles animalières sont un défi aux canons de l’art au féminin.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.

Marie-Rosalie Bonheur, dite Rosa Bonheur (1822-1899), peintre, 1850. Jean-Pierre Dantan (dit Dantan Jeune) (1800-1869).
Sculpture. Musée Carnavalet-Histoire de Paris
Ce buste par Dantan montre que Rosa Bonheur est reconnue dès 1850 comme une grande peintre animalière, le sculpteur ayant fait figurer sur le socle un motif inspiré de son tableau salué par la critique, Labourage nivernais. Très appréciée de l’impératrice Eugénie, elle est la première femme artiste à recevoir la Légion d’honneur, en 1865. Elle incarne la possibilité d’une vie libre, indépendante, anticonformiste, à l’image de son goût pour le costume masculin.
Voir aussi :
Rosa Bonheur
Wikipédia
Rosa Bonheur
AWARE
Rosa Bonheur, une artiste de génie tombée dans l’oubli
Fiona Moghaddam
France Culture, 16 mars 2022
Audio. Série « Création au féminin (second volet) » : Épisode 4/5 : Rosa Bonheur (1822 -1899), peintre animalière ambitieuse et femme à facettes
Toute une vie : 40 figures de la culture, France Culture, 20 août 2020, 58′
Château de Rosa Bonheur
Instruites
Le droit au savoir, non seulement à l’éducation, mais à l’instruction est sans doute la revendication féministe la plus ancienne, la plus constante, la plus largement partagée. Ce droit commande tout : l’émancipation, la promotion, le travail, la création, le plaisir. Cette revendication s’accompagne d’un immense effort d’appropriation : lecture, écriture, accès aux enseignements. L’universalisme français privilégie l’accès aux grades communs : le baccalauréat pour Julie Daubié, par exemple.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.

Apprendre à lire et à écrire et acquérir des connaissances sont indispensables à l’exercice de la citoyenneté. L’instruction permet une meilleure compréhension du monde et donne accès à des emplois qualifiés, à une autonomie financière. Marie Pape-Carpantier et Louise Michel militent pour une instruction gratuite et pour l’éducation des tout-petits. Elisa Lemonnier fonde l’enseignement professionnel féminin. Les lois Jules Ferry de 1881-1882 rendent l’école publique gratuite, laïque et obligatoire pour tous et toutes. Mais il faut attendre les années 1960-1970 pour que toutes les écoles soient mixtes.

Marie Pape-Carpantier, 1878. Charles Crès (1850-1907), d’après Xavier-Alphonse Monchablon (1835-1907). Peinture. Propriété Ville de La Flèche
Voir aussi :
Marie Pape-Carpantier
Wikipédia
Pape-Carpantier, Marie (-Joséphine-Olinde) née Carpantier
Colette Cosnier, maître de conférences honoraire
charlesfourier.fr (Le site des associations d’études fouriéristes et des Cahiers Charles Fourier), 7 janvier 2011, dernière modification 26 juin 2022
Marie Pape-Carpantier Pédagogue et féministe
Blog dédié au Musée de l’école à Montceau-les-Mines, octobre 2017

Annonce de l’ouverture d’une « école des deux sexes » dans le 5e arrondissement, 1870. Imprimerie De Soye et Fils. Affiche.
Musée Carnavalet-Histoire de Paris.
En 1861, Julie Daubié conquiert la première son baccalauréat de haute lutte. Il fallut, pour convaincre les réticences du recteur de Lyon, le soutien du saint-simonien Arlès-Dufour et l’intervention de l’impératrice Eugénie auprès du ministre Victor Duruy, assez convaincu personnellement.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.
| La Femme pauvre au XIXe siècle, 1866 Julie-Victoire Daubié (1824-1874) Ouvrage – Bibliothèque nationale de France, bibliothèque de l’Arsenal, 8-Z-51559 Dans Paris, grande ville ouvrière, les travailleuses sont « moitié moins rétribuées que les hommes remplissant des fonctions analogues ou exécutant les mêmes travaux », écrit Julie-Victoire Daubié dans l’avant-propos de La Femme pauvre au XIXe siècle. Première femme titulaire du baccalauréat (1861), première licenciée en lettres et féministe engagée, elle a mené une enquête approfondie sur les conditions de vie des femmes des classes populaires. |
Voir aussi :
Julie Daubié
Wikipédia
La première femme bachelière : Julie Daubié
Paulette Bascou-Bance
Bulletin de l’Association Guillaume Budé, 1972, pp. 107-113
Audio. Série « Ces figures qui ont façonné l’université » : Épisode 3/4 : Julie-Victoire Daubié, une pionnière à l’université
Rebecca Rogers Professeure à l’université Paris Descartes.
Le Cours de l’histoire, France Culture, 20 janvier 2021, 52′
Les femmes de la Commune se mobilisent
Refusant la capitulation de la France devant la Prusse, et après un siège éprouvant, Paris se soulève le 18 mars 1871. Le 26, un conseil de la Commune est élu. Ni électrices ni éligibles, les Parisiennes sont néanmoins d’actives insurgées. Le 11 avril, Nathalie Lemel et Élisabeth Dmitrieff créent l’Union des femmes pour la défense de Paris et les soins aux blessés, qui organise des secours et distribue le travail pour les ouvrières.
Dans les clubs mixtes ou féminins, des citoyennes de tous les milieux expriment leurs désirs, leurs révoltes et votent des motions. Elles écrivent dans la presse. André Léo, dans La Sociale, défend l’idée qu’il n’est pas de démocratie et de progrès sans les femmes. L’utopie se concrétise dans des mesures sociales audacieuses, mais l’attaque des troupes versaillaises y met fin, transformant Paris en un bain de sang.
Voir aussi :
Il y a 150 ans, les femmes de la Commune de Paris étaient sur les barricades
TV5MONDE, 22 mai 2021
Video. Les Damnés de la Commune
Raphaël Meyssan, 1 27′ 07
Louise Michel
Wikipédia
MICHEL Louise [Dictionnaire des anarchistes] par Véronique Fau-Vincenti, version mise en ligne le 6 mars 2009, dernière modification le 13 novembre 2022
Dictionnaire biographique Le Maitron, mouvement ouvrier, mouvement social
Audio. Grande Traversée : Louise Michel, femme tempête
Série en cinq épisodes, France Culture, du 16 au 20 août 2021
Audio. Série « La Nuit des féminismes 1/2 : Quelques pionnières… » Épisode 3/10 : « Le fol et unique espoir de Louise Michel jeune fille, c’était d’être poète, comme son idole, Victor Hugo »
Les Nuits de France Culture, France Culture, 19 janvier 2022 (1ère diffusion 7 février 2021), 56′
André Léo
Wikipédia
CHAMPSEIX André Léo [née BÉRA Victoire, Léodile, dite], version mise en ligne le 26 juillet 2009, dernière modification le 18 avril 2022
Dictionnaire biographique Le Maitron, mouvement ouvrier, mouvement social
André Léo, la communarde
Roger Musnik
In Romanciers populaires du XIXe siècle, BnF Gallica, 14 Août 2020
Victorine Brocher
Wikipédia
BROCHER Victorine (née MALENFANT, épouse ROUCHY puis BROCHER) [Dictionnaire des anarchistes] par Marianne Enckell, version mise en ligne le 12 avril 2014, dernière modification le 14 août 2021
Dictionnaire biographique Le Maitron, mouvement ouvrier, mouvement social
Nathalie Lemel
Wikipédia
LE MEL Nathalie [née DUVAL Perrine, Natalie] écrit parfois par erreur LEMEL, version mise en ligne le 3 mars 2015, dernière modification le 6 août 2021
Dictionnaire biographique Le Maitron, mouvement ouvrier, mouvement social
Élisabeth Dmitrieff
Wikipédia
DMITRIEFF Élisabeth (TOMANOVSKAÏA dite), version mise en ligne le 18 février 2009, dernière modification le 22 février 2021
Dictionnaire biographique Le Maitron, mouvement ouvrier, mouvement social

Cantinière de la 6ème compagnie du 21ème bataillon,
23 novembre 1870. Alexandre Bida (1823-1895)
Dessin – Musée Carnavalet – Histoire de Paris


« La barricade de la place Blanche défendue par des Femmes », 1871.
Série La Prise de Paris (mai 1871), n° 4
Barousse, imprimeur-lithographe, Deforêt & César, éditeur
Estampe – Musée Carnavalet – Histoire de Paris
Voir aussi :
Femmes et barricades
Sylvie Aprile
EHNE (Encyclopédie d’histoire numérique de l’Europe)
Genre et violences politiques XIXe-XXe siècles
Fanny Bugnon
EHNE (Encyclopédie d’histoire numérique de l’Europe)
Droits des femmes et République (1871-1914)
(Source : Parisiennes citoyennes ! Engagements pour l’émancipation des femmes (1789-2000)
La Troisième République donne un nouveau cadre aux engagements des Parisiennes.
Sur le terrain politique, Hubertine Auclert est la première militante s’identifiant comme féministe. En 1882, elle parvient à imposer l’idée que le droit de vote et d’éligibilité des femmes est la clé de voûte de tous les autres droits. Le suffragisme devient, à l’aube du 20e siècle, le combat principal des féministes.
Sur le terrain social, les Parisiennes participent aux luttes pour l’amélioration des conditions de vie et de travail des ouvrières et des employées, par la grève, le syndicalisme, l’action pour de nouveaux droits.
Sur le terrain des savoirs, les progrès de l’instruction des filles sont spectaculaires : la République française veut «donner aux citoyens des mères et épouses éduquées». La capitale attire également des femmes qui se distinguent dans les domaines scientifique et artistique.
La figure émergente de la Femme nouvelle résume à la fois le désir d’égalité et le droit à l’indépendance. Qu’il s’agisse de la maîtrise de la fécondité, des nouvelles pratiques sportives ou de l’évolution du vêtement, les Parisiennes sont résolument engagées sur les chemins de l’émancipation.
L’instruction, condition de l’émancipation
Dès 1868, Paris ouvre aux filles le certificat d’études, avec douze ans d’avance sur le reste du pays.
Les excellents résultats des candidates sont soulignés, Les ressources financières de la Ville permettent de recruter du personnel et l’offre d’écoles privées y est importante.
L’instruction est pour les féministes la base de l’émancipation. Les lois Ferry de 1881-1882 permettent aux filles d’accéder à l’école dans les mêmes conditions que les garçons : obligation jusqu’à 13 ans, gratuité, laïcité. Le retard de l’alphabétisation des filles sera vite comblé.
La révolution se poursuit avec l’accès aux études secondaires et supérieures, réservé à une élite féminine souvent acquise aux idées féministes.
La IIIème République triomphante voulait souscrire les filles à l’église de Mgr Dupanloup. D’où les lois Ferry (1881) créant l’école primaire gratuite, obligatoire et laïque. Pour les deux sexes, avec les mêmes programmes, mais dans des lieux séparés pour des raisons de réputation morale.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.

« À l’Hôtel de Ville. Les examens de jeunes filles »,
Le Petit Journal, 28 juillet 1895
Fortuné Louis Méaulle (1844-1901), auteur du modèle, Oswaldo Tofani (1849-1915), dessinateur-lithographe
Journal. Musée Carnavalet-Histoire de Paris

Marie Curie au milieu de ses élèves de l’école de Sèvres, 1904
Anonyme
Photographie — Prêt du musée Curie-Institut Curie-Paris
L’ École normale supérieure de jeunes filles, créée en 1881 à Sèvres, a pour vocation de former les enseignantes destinées à exercer dans les lycées de filles. Y enseignent des personnalités renommées, comme la physicienne et chimiste Marie Curie. À l’issue de la formation, les élèves de Sèvres peuvent prétendre au certificat d’aptitude à l’enseignement secondaire de jeunes filles et tenter l’agrégation féminine. Les concours de l’agrégation ne deviennent totalement mixtes qu’en 1976.
Femmes nouvelles
Dans le Paris des années 1900, des femmes accèdent à des rôles de premier plan dans le monde du travail et de la culture. Avocates, scientifiques, doctoresses, écrivaines ou sportives, elles imposent leur image de Femmes nouvelles », c’est-à-dire de femmes indépendantes et convaincues de l’égalité des sexes.
Certaines femmes connaissent la gloire et donnent l’exemple de carrières possibles, malgré les discriminations. Les femmes nouvelles se libèrent de leurs entraves, conquièrent le droit au mouvement. Elles se ruent vers les nouvelles pratiques sportives, n’hésitent pas à prendre part à des compétitions. Dans la capitale mondiale de la mode féminine, elles inspirent des transformations vestimentaires. Paris est au cœur de toutes ces nouveautés qui annoncent la modernité du 20 e siècle.


Si l’homosexualité féminine était jusqu’à présent tabou, tout change autour de 1900. « En ce temps-là Sapho ressuscita dans Paris », écrit Arsène Houssaye. Les « Amazones de Paris » – Natalie Clifford Barney, Renée Vivien, Colette, bien d’autres – retrouvent les chemins de Lesbos et animent, rive gauche, des cercles littéraires libres et raffinés. C’est le temps des jeunes filles en fleurs, qui tourmentent le « narrateur ».
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.
Voir aussi :
De la topographie invisible à l’espace public et littéraire : les lieux de plaisir lesbien dans le Paris de la Belle Époque
Nicole G. Albert
Revue d’histoire moderne & contemporaine, 2006/4, n° 53-4, pp. 87-105

Colette (1873-1954), vers 1910-1912
Anonyme
Photographie – Musée CarnavaIet – Histoire de Paris
Venue de Saint-Sauveur-en-Puisaye, Colette se métamorphose à Paris. Å l’époque des Claudine puis de ses performances de mime, elle incarne « la femme nouvelle », avec des cheveux courts, en pionnière de la mode « garçonne ». Son Œuvre célèbre « ces plaisirs qu’on nomme, à la légère, physiques » ; elle explore le genre, officiel ou secret, « l’être femelle » et « l’hermaphrodisme mental ». Sa liberté personnelle fait d’elle une personnalité à part.
Voir aussi :
Colette
Wikipédia
Biographie de Colette
Les amis de Colette
Audio. Colette (1873-1954)
Toute une vie, France Culture, 21 janvier 2023, 58′
Audio. Colette, une femme libre
10 épisodes
Les Nuits de France Culture, France Culture
La maison de Colette
Marie Curie à I’lnstitut du radium, 1912
Henri Manuel (1874-1947) Photographie Prêt du musée Curie-institut Curie-Paris
Seule femme ayant reçu deux prix Nobel (physique 1903, chimie 1911), Marie Curie est aussi la première professeure titulaire d’une chaire å la Sorbonne (1906). Jeune veuve, elle est attaquée sur sa vie privée lors d’une violente campagne sexiste et xénophobe et se voit refuser, en 1911, l’accès à l’Académie des sciences. Femme engagée dans et pour les sciences, elle équipe des ambulances en radiologie qui sauvent de nombreuses vies en 1914-1918 et transmet sa passion de la recherche à sa fille, Irène.

Voir aussi :
Marie Curie
Wikipédia
Biographie de Marie Curie
Musée Curie
Audio. Marie Curie : une intelligence irradiante
La Méthode scientifique, France Culture, 9 novembre 2017, 58′
Audio. Marie Curie : une icône de la République
La Marche des sciences, France Culture, 31 mai 2012, 57′
Audio. Série « La recherche, une histoire de famille » : Épisode 2/4 : Curie, une famille rayonnante
Le Cours de l’histoire, France Culture, 17 décembre 2024, 59′
Vidéo. Conférence de Claudine Monteil sur son livre « Marie Curie et ses filles »
Institutul Francez din România, Youtube, 8 mars 2022, 59,25
Féminismes en art : peintres et sculptrices
Écrire fut difficile. Peindre, sculpter, composer de la musique, créer de l’art le fut encore plus. A cela des raisons de fond : l’image et la musique sont des formes de création du monde. Les femmes peuvent tout juste copier, traduire, interpréter. Elles peuvent peindre pour les leurs, crayonner les portraits des enfants, esquisser des bouquets de fleurs ou des paysages. L’initiation aux arts d’agrément ne devait mener ni à une profession ni à la création. Un véritable apprentissage était exclu. Sous prétexte que le nu devait être caché aux jeunes filles, on leur refusait l’accès à l’École des beaux-arts qui, à Paris, ne leur fut ouverte qu’en 1900, non sans chahut des étudiants. Les filles devaient se rabattre sur les écoles et les académies privées, dont la plus célèbre fut à Paris l’académie Jullian.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.

Les Causeuses, dites aussi Les Bavardes, 2è version, 1895
Camille Claudel (1864-1943)
Sculpture – Musée Rodin, Paris, S.06291
Présentée au Salon en 1896, cette œuvre crée l’événement par sa modernité. Le critique Octave Mirbeau salue alors l’artiste : Voici une jeune femme au cerveau bouillonnant d’idées, à l’imagination somptueuse, à la main sûre, assouplie à toutes les difficultés du métier de statuaire; une jeune femme exceptionnelle sur qui n’est demeurée l’empreinte d’aucun maître et qui prouve quo son sexe est susceptible de création personnelle. »
Voir aussi :
Camille Claudel
Wikipédia
Biographie de Camille Claudel
Musée Camille Claudel
Camille Claudel
AWARE
Audio : Série « Création au féminin (second volet) » : Épisode 5/5 : L’or de Camille Claudel (1864-1943)
Toute une vie : 40 figures de la culture, France Culture, 21 août 2020, 59′

Au cours d’un voyage en Angleterre, Camille Claudel répondit à un questionnaire de personnalité…
Marie Bashkirtseff a écrit un journal de dix-neuf mille pages, remarquable témoignage sur le quotidien et les souffrances d’une jeune femme qui aspirait à être une véritable artiste et se heurtait à l’incompréhension de sa famille, qui ne pensait qu’à la marier, et aux préjugés de son temps. A l’académie Jullian, dont elle appréciait l’atmosphère de camaraderie égalitaire, elle était heureuse : « A l’atelier, tout disparaît, on n’a ni nom, ni famille. […] On est soi-même, on est un individu et on a devant soi l’art et rien d’autre. » Mais elle déplore l’insuffisance de formation, le machisme et la condescendance dont font preuve les professeurs : « Ces Messieurs nous méprisent, écrit-elle et ce n’est que quand ils trouvent une facture forte et brutale qu’ils sont contents; C’est un travail de garçon, a-t-on dit de moi. Cela a du nerf, c’est nature. » Elle est primée, contente mais pas dupe. Elle sait le chemin à parcourir pour devenir vraiment grande.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.
Portrait debout, vers 1880
Marie Bashkirtseff (1858-1884)
Peinture – Musée des Beaux-Arts Jules Chéret de Nice T
Sous le pseudonyme de Pauline Orell, Marie Bashkirtseff défend en 1881 dans La Citoyenne les carrières artistiques féminines. Venue d’Ukraine et installée à Paris en 1876, elle estime sa carrière freinée par le fait qu’elle est une femme : « Je voudrais être un homme, je sais que je pourrais devenir quelqu’un, mais avec des jupes, où voulez-vous qu’on aille ? » Cet autoportrait traduit l’ambition de la jeune artiste surdouée qui a livré dans son Journal un témoignage précieux de la vie des artistes femmes.

Voir aussi :
Marie Bashkirtseff
Wikipédia
Marie Bashkirtseff
AWARE
Marie Bashkirtseff, peintre révoltée dans les rangs de l’Académie Julian
Florelle Guillaume
Beaux Arts Magazine, 30 mars 2023
Audio. Marie Bashkirtseff : « Je veux qu’on puisse publier mon journal qui ne peut pas être autre chose qu’intéressant »
Les Nuits de France Culture, France Culture, 3 août 2024 (1ère diffusion 12 mars 2017), 60′
Audio. « Marie Bashkirtseff et l’Héritage d’une Vie Trop Courte »
Art au féminin, 1er mai 2024, Spotify
Sarah Bernhardt a changé le statut de l’actrice. Son succès lui permit d’être exigeante, non seulement financièrement, mais aussi pour la quotidien. Elle fit de sa loge un lieu agréable et veilla au confort du théâtre qu’elle créa place du Châtelet, aujourd’hui « Théâtre de la Ville ». Elle refusait la galanterie dont elle percevait le revers, la domination masculine. elle exigeait considération et respect. Elle se disait féministe, mais non suffragette, soucieuse surtout d’égalité salariale et du droit de recherche en paternité. Elle fut aussi une femme engagée pour Dreyfus et pour Zola.
Elle n’est sans doute pas une « actrice moderne ». Elle n’aimait pas les « nordistes », Ibsen, Strindberg, Tchekhov, qu’elle n’interpréta pas. Elle préférait Ruy Blas et surtout le théâtre d’Edmond Rostand. Son physique impressionnait : elle incarnait la femme nouvelle du modern style. Son mode de vie fascinait. Son train de vie faisait rêver. Son courage aussi. Elle continua de jouer L’Aiglon en dépit de son amputation d’une jambe. Elle avait un côté moralisateur et s’en vantait. Son lyrisme patriotique atteignit des sommets durant la Grande Guerre. Elle se fit le chantre de la Nation.
Lorsqu’elle mourut en 1923, on lui fit des obsèques solennelles au Père-Lachaise. Des dizaines de milliers de personnes suivirent son cercueil à travers Paris.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.

« Sarah Bernhardt faisant sa classe au conservatoire », Le Monde illustré, 2 mars 1907. Maurice Toussaint (1882-1974) Impression photo-mécanique. Musée Carnavalet – Histoire de Paris

Gismonda, de Victorien Sardou, avec Sarah Bernhardt, théâtre de la Renaissance, 1894
Alphonse Hucha (1860-1939)
Affiche Musée Carnavalet – Histoire de Paris
Cette affiche somptueuse d’Alphonse Mucha destinée aux colonnes Morris témoigne de la célébrité exceptionnelle de Sarah Bernhardt. Le nom de cette comédienne interprétant tour à tour des rôles d’hommes et de femmes sar scène est associé toutes tes libertés. Personnage extravagant, femme d’affaires directrice de théâtre, elle est aussi une femme engagée. Soutien du capitaine Dreyfus, elle subit un antisémitisme qui associe émancipation féminine, liberté sexuelle et influences juives.
Voir aussi :
Sarah Bernhardt
Wikipédia
Sarah Bernhardt
AWARE
Sarah Bernhardt, la divine
BnF
Audio. Sarah Bernhardt, de la femme à la star
Bienvenue au Club, France Culture, 12 avril 2023, 28′
Audio. Sarah Bernhardt de Paris à Belle-Île-en-Mer en passant par Boston
3 épisodes
Les Nuits de France Culture, France Culture, du 19 au 21 mars 2015, 1 10′ chacun
Sportives

Le sport a été inventé par et pour les hommes. Il promeut des valeurs viriles : la force, l’honneur, le fair-play et l’esprit de conquête. Le sport intéresse aussi les femmes, mais la morale leur interdit longtemps les tenues adaptées à ces pratiques.
À la fin du 19e siècle, certaines s’initient au vélo avec des pantalons courts bouffants, les « bloomers »Les sportives de la capitale créent leurs propres clubs (la première société de natation féminine en 1906) et organisent des compétitions souvent populaires, comme la course des midinettes*, en 1903.
*Midinettes est le nom donné aux femmes travaillant dans les maisons de couture parisiennes.


Le Chalet du Cycle au bois de Boulogne, 1900
Jean Béraud (1849-1935)
Tableau – Musée Carnavalet – Histoire de Paris
A femme nouvelle, allure nouvelle. L’ordonnance du préfet de police de Paris interdisant aux femmes le port du pantalon est contestée le 1er juillet 1887 par la féministe Marie-Rose Astié de Valsayre, qui en revendique l’usage pour l’escrime et le cyclisme. Elle demande dans une pétition aux députés le droit au costume masculin, qu’elle trouve plus décent pratique et hygiénique que les atours des « esclaves du luxe ». La réforme vestimentaire est en marche, à l’initiative des féministes, sportives et hygiénistes.

« La course des midinettes », Le Petit Journal, 8 novembre 1903
Voir aussi :
Marie-Rose Astié de Valsayre
Wikipédia
ASTIÉ DE VALSAYRE Marie-Rose [pseudonyme de TASTAYRE Claire] par Julien Chuzeville, version mise en ligne le 19 juin 2021, dernière modification le 22 novembre 2022
Dictionnaire biographique Le Maitron, mouvement ouvrier, mouvement social
Marie de Valsayre, musicienne (1/6)
Astié de Valsayre, enragée (2/6)
Astié de Valsayre, féministe duelliste (3/6)
Astié de Valsayre, socialiste libre-penseuse (4/6)
Astié de Valsayre, candidate à perpète (5/6)
Astié de Valsayre, écrivaine grivoise (6/6)
Polmorésie, blog d’histoire
L’essor du féminisme
Grâce aux libertés de réunion, de presse, de manifestation puis d’association, le féminisme devient un mouvement permanent bien organisé. Autour du juriste Léon Richer et de l’oratrice Maria Deraismes, un mouvement républicain pour la défense des droits des femmes se structure. Paris voit naître une nouvelle vague d’associations féministes, de sensibilités diverses. La ville accueille des conférences, des réunions publiques et des congrès. En 1878, lors de l’Exposition universelle, le Congrès international du droit des femmes dure dix jours.
Le mouvement est aussi culturel : le féminisme est diffusé par la presse, la littérature, le théâtre. L’aile la plus radicale veut de l’action : Hubertine Auclert appelle le 14 juillet 1881 à prendre la « Bastille des femmes », visant « la loi, le Code civil ». C’est la première manifestation de rue féministe en France.
« Libérée par la loi de 1881, qui fonde le régime du journalisme moderne, la presse féministe de la IIIème République est plus abondante. Des dizaines de titres entre 1880 et 1914, dont La Citoyenne d’Hubertine Auclert et surtout la Fronde de Marguerite Durand, expérience exceptionnelle. La Fronde, quotidien (1897-1901), puis mensuel (1901-1905), est entièrement conçu, rédigé, et même composé typographiquement par des femmes, ce qui n’était pas le plus facile, étant donné l’hostilité des métiers du Livre à l’emploi des femmes.
Désormais, le journal fait partie des formes d’expression des femmes, en France comme dans la plupart des pays occidentaux. Du même coup, les femmes accèdent à un métier jusque-là masculin : le journalisme. Après Georges Sand et Delphine de Girardin, journalistes occasionnelles, Colette, Séverine, Gyp, Louise Weiss empruntent des chemins nouveaux, mieux définis et plus hardis. »
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.

Marguerite Durand, directrice du quotidien féministe La fronde, 1897
Jules Cayron (1868-1944)
Peinture. Ville de Paris / Bibliothèque Marguerite Durand
Marguerite Durand, ex-jeune première à la Comédie-Française devenue journaliste, est envoyée en 1896 par Le Figaro au Congrès féministe international de 1896 qui se tient 8, rue Danton (6e arr.). On attend d’elle un compte rendu sarcastique.
Mais, impressionnée par la qualité des débats, elle se « convertit » au féminisme, se rapproche de la Ligue française pour le droit des femmes et devient l’une des militantes les plus importantes de la Troisième République.

Voir aussi :
Marguerite Durand (féministe)
Wikipédia
Marguerite Durand : des planches à la presse
Nejma Omari, 27 juillet 2021
BnF Gallica
Marguerite Durand
Gallica vous conseille
Audio. Marguerite Durand, fondatrice du premier quotidien féminin : La Fronde
Il était une femme, France inter, 13 janvier 2019, 3′
La Fronde se hisse au niveau des grands journaux d’opinion et d’information, cités par les confrères. Il bénéficie de grandes signatures – Colette épisodiquement – et du talent de journalistes professionnelles, comme Séverine, qui « couvre » la révision du procès Dreyfus à Rennes. Le journal a pris résolument parti pour Dreyfus et pour Lucie, la ferme et discrète compagne dont la Correspondance révèle le courage sans faille. Par cette affaire, presque par effraction, les féministes accèdent au rang d’ »intellectuelles », nouvelle catégorie d’acteurs publics pensés au masculin.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.
Clémentine-Hélène Dufau. La Fronde, 1898. © Paris Musées / Musée Carnavalet – Histoire de Paris
La Fronde, quotidien créé par Marguerite Durand, rédigé, composé et administré uniquement par des femmes, paraît de manière régulière de 1897 à 1903, puis épisodiquement. Servi par une publicité moderne, il tire jusqu’à 50 000 exemplaires. Installé dans un hôtel particulier 14, rue Saint-Georges, le siège du journal est pourvu d’une salle de rédaction, d’un salon de thé, d’une salle d’exposition, d’une bibliothèque et d’une salle d’escrime. Les « frondeuses » sont recrutées parmi les meilleures plumes du temps.

Voir aussi :
La Fronde (journal)
Wikipédia
La Fronde
RetroNews
Femmes, féministes et journalistes : les rédactrices de La Fronde à l’épreuve de la professionnalisation journalistique
Sandrine Lévêque
In La cause des femmes, Le Temps des médias, 2009/1, n° 12, pp. 41-53
Audio. En 1898 paraissait La Fronde, premier journal féministe du monde
C’était à la une, France Culture, 11 janvier 2019, 5′

La journaliste Séverine, 1893
Amélie Beaury-Saurel (1848-1924)
Peinture – Musée Carnavalet – Histoire de Paris
Première journaliste professionnelle, Caroline Rémy, dite Séverine (1855-1929) s’est initiée auprès de Jules Vallès en travaillant pour Le Cri du peuple. Dreyfusarde, pacifiste, socialiste de sensibilité anarchiste, militante des droits humains et de la cause animale, elle est l’autrice d’environ 6 000 articles dans de nombreux journaux. Son féminisme s’ancre dans sa propre expérience de victime de violences conjugales. Elle est particulièrement sensible au droit des femmes à disposer de leur corps.
Voir aussi :
Séverine
Wikipédia
Pionnières ! Episode 2 : Séverine
Équipe Gallica, 24 avril 2019
Séverine
Gallica vous conseille
Audio. Séverine, une journaliste debout (1855 -1929)
Une vie, une œuvre, France Culture, 59′

La Française, sous-titré Journal de progrès féminin, est créé en 1906 par la féministe Jane Misme, qui en assure la direction jusqu’en 1926, pour céder la place à Cécile Brunschvicg, future sous-secrétaire d’État du Front populaire.
Le titre paraîtra jusqu’en 1940. (Source : Wikipédia)
Série « Femmes écrivains, femmes artistes » : Épisode 4/5 : Journalistes, les femmes aussi
Marie-Eve Thérenty Professeure de littérature française et directrice du centre de recherche RIRRA21 à l’université de Montpellier 3.
France Culture, 24 février 2024, 58′
Suffragettes

Dès la fin du 19e siècle, le mouvement féministe revendique pour les femmes le droit de voter et d’être élues. L’expression de son opinion par le vote s’appelle le suffrage. On désigne donc ces militantes sous le nom de « suffragistes » ou « suffragettes ». Hubertine Auclert lance en France ce mouvement aux modes d’actions variés : tracts, meetings, refus de payer des impôts, perturbation des élections en renversant les urnes, fabrication d’objets militants, etc. A chaque élection, des féministes se présentent alors qu’elles n’en ont pas le droit. Ce n’est qu’en avril 1944 que les femmes françaises obtiennent le droit de vote.
Voir aussi :
Suffragette
Wikipédia
Droit de vote des femmes : contrairement aux suffragettes anglaises, les suffragistes françaises restent légalistes
Historia, 24 avril 2024
Audio. Série « Les femmes et le pouvoir » : Épisode 4/5 : Florence Rochefort : « Pour Hubertine Auclert c’est du droit de vote que découleront les autres droits »
Les Nuits de France Culture, France Culture, 10 mars 2023 (1ère diffusion 26 juin 2022), 32′
Audio. Série « Sécurité, sûreté, liberté, une histoire » : Épisode 4/4 : Des suffragettes au MLF, quand les femmes rendent coup pour coup
Le Cours de l’histoire, France Culture, 3 juin 2021, 52′
Audio. Série « Les citoyens et l’exercice du pouvoir » : Épisode 3/4 : Femmes, ouvriers, étrangers : qui sont les exclus de la citoyenneté au XIXe siècle ?
La Fabrique de l’Histoire, France Culture, 16 janvier 2019, 52′
Hubertine Auclert, la Citoyenne, avec son grand chapeau, intervient dans les mairies, au moment des mariages, pour protester contre les articles du Code civil exigeant des femmes qu’elles promettent obéissance à leur mari. Aimable scandale.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.

Hubertine Auclert (1848-1914), vers 1890
Charles Gallot, dit G. Charles (actif de 1870 à 1900)
Photographie – Ville de Paris/Bibliothèque Marguerite Durand
Venue Paris pour défendre la cause féministe, Hubertine Auclert fonde en 1876 la société Le Droit des femmes et en 1881 le journal La Citoyenne. Pour elle, le féminisme concerne tous les enjeux de l’égalité des sexes : les droits civiques et civils, le droit au travail, l’évolution du costume, la féminisation de la langue… Très innovante, elle est la première suffragiste française, militant pour l’obtention par les femmes des droits politiques. Elle est aussi considérée comme la première suffragette (suffragiste prônant des méthodes radicales d’action).
Voir aussi :
Hubertine Auclert
Wikipedia
Qui est Hubertine Auclert ?
Centre Hubertine Auclert
AUCLERT Hubertine. Notice par Justinien Raymond, version mise en ligne le 30 mars 2021, dernière modification le 6 octobre 2022
Dictionnaire biographique Le Maitron, mouvement ouvrier, mouvement social
Hubertine Auclert et les droits des femmes : itinéraire médiatique d’une suffragiste
Nejma Omar
BnF Gallica, 30 Juin 2021
Audio. Hubertine Auclert, portrait d’une suffragette
Il était une femme, France inter, 3′
Mme Maria Vérone à la tribune, 1910
Léon Fauret (1863-1955)
Peinture – Collection Les images de Marc
Ce tableau est reproduit dans Femina (1er avril 1910) pour illustrer l’article « Le premier meeting des suffragettes françaises », qui s’est tenu le 11 mars 1910. Pendant la campagne électorale, sous la présidence de Marie Bonnevial, spécialiste reconnue du travail féminin et pionnière de la franc-maçonnerie mixte, Hubertine Auclert et Nelly Roussel prennent la parole. L’avocate Maria Vérone enflamme l’assemblée en remplaçant le mot « hommes » par « êtres humains » dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.

Voir aussi :
Maria Vérone
Wikipédia
VÉRONE Maria. Notice par Christine Bard, version mise en ligne le 30 novembre 2010, dernière modification le 29 octobre 2022
Dictionnaire biographique Le Maitron, mouvement ouvrier, mouvement social
Maria Vérone, première voix du féminisme
Antoine Provansal
BnF, Gallica, La Voix des femmes, 10 Mars 2022

« L’action féministe : les « suffragettes » envahissent une section de vote et s’emparent de l’urne électorale », Le Petit Journal, 17 mai 1908 – Journal – Ville de Paris / Bibliothèque Marguerite Durand

Bannière de la société Le Suffrage des femmes, arborée lors de la manifestation féministe du 5 juillet 1914
Ville de Paris / Bibliothèque historique de la ville de Paris
« Jusqu’ici, le féminisme, redouté dans les rues de Londres, n’avait pas fait son apparition dans les rues de Paris. Hier, pour la première fois, un cortège de femmes s’est déroulé sur nos quais, un cortège digne, ordonné, gracieux, avec très peu de bannières, beaucoup de fleurs et une large moisson de rameaux d’oliviers. » (Le Matin, 6 juillet 1914.) Cette manifestation féministe rend hommage à Condorcet (1743-1794), philosophe, mathématicien, révolutionnaire et défenseur des droits des femmes
Le vote des femmes : cours professé à l’École des hautes études sociales pendant l’année 1917-1918
Joseph-Barthélémy (1874-1945)
édition F. Alcan, 1920
Paris, ville malthusienne
Le mouvement néo-malthusien estime qu’il faut limiter la croissance de la population mais en émancipant les femmes qui, privées d’information et d’accès à la contraception, subissent des grossesses non désirées.
En France, Paul Robin est le chef de file de ce mouvement. Pédagogue, anarchiste et internationaliste, il crée en 1896 à Paris la Ligue de la régénération humaine, qui prône la maîtrise de la fécondité. Quelques féministes aux sympathies libertaires, Madeleine Pelletier et Nelly Roussel notamment, le rejoignent.
Le mouvement ouvrier s’intéresse aussi à la « grève des ventres » anticapitaliste et antimilitariste, un mot d’ordre lancé par Marie Huot, poétesse libertaire, féministe et animatrice de la Ligue contre la vivisection.
Paris est une ville réceptive à ces idées nouvelles, annonciatrices d’une révolution sexuelle à venir.
Les féministes hésitaient à aborder les questions sexuelles. Seule une minorité soutenait le néo-malthusianisme : Nelly Roussel, Gabrielle Petit, la doctoresse Madeleine Pelletier, qui, dès 1912, publia un livre soutenant le droit à l’avortement.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.
Nelly Roussel et les comédiennes de Par la révolte, 1903
Anonyme
Photographie—Ville de Paris / Bibliothèque Marguerite Durand
Nelly Roussel est une oratrice dont les performances attirent jusqu’à 2000 personnes. Dans l’atelier de son mari sculpteur, 58, rue du Rendez-vous (12e arr.), elle répète la pièce de théâtre qui sera donnée le mai 1903 dans la salle des Sociétés savantes, sous les auspices de la Ligue française pour le droit des femmes. Elle y incarne Ève portant des chaînes trop lourdes, accablée par les siècles d’oppression.


Nelly Roussel avec sa fille Mireille Godet, 1904 – Henri Godet (1863-1937)
Sculpture – Ville de Paris / Bibliothèque Marguerite Durand
Voir aussi :
Nelly Roussel
Wikipédia
ROUSSEL Nelly [Dictionnaire des anarchistes] par Véronique Fau, version mise en ligne le 23 février 2014, dernière modification le 23 novembre 2022
Dictionnaire biographique Le Maitron, mouvement ouvrier, mouvement social



En 1903, Madeleine Pelletier devient la première femme admise à passer l’internat en psychiatrie. Intellectuelle et activiste, socialiste, franc-maçonne, elle est surtout connue comme la figure la plus radicale du féminisme français. L’égalité des sexes passe, pour elle, par l’effacement de la différence de genre : elle s’habille en homme et choisit le célibat. Selon elle, l’oppression des femmes est avant tout sexuelle. Elle est la première féministe défendant le droit à l’avortement.
Pour les femmes, devenir médecin ne fut pas simple. Les hommes résistaient à leur entrée dans la profession. Les premières étudiantes furent des Russes et des Polonaises, juives pour la plupart, qui avaient commencé leurs études dans les universités de l’Est. Chassées par les pogromes de la fin du XIXème siècle, elles voulaient poursuivre leurs études à Londres, Zurich ou Paris. Elles choisirent souvent la gynécologie. Elles étaient quelques centaines en France avant 1914. Ainsi Blanche Edwards-Pilliet ou la doctoresse Madeleine Pelletier. Favorable à la contraception et à l’avortement, elle fut poursuivie et internée en 1938 dans un asile psychiatrique où elle mourut en 1939.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.
Voir aussi :
Madeleine Pelletier
Wikipédia
PELLETIER Madeleine [PELLETIER Anne, Madeleine] par Claude Maignien, version mise en ligne le 31 janvier 2009, dernière modification le 1er décembre 2022
Dictionnaire biographique Le Maitron, mouvement ouvrier, mouvement social
Madeleine Pelletier, une « féministe intégrale »
Personne interrogée : Claude Maignien / Interviewer : Claire Auzias Danielle Sivadon
Chimères. Revue des schizoanalyses, 1997, n° 31 pp. 125-141 – In Boulevard des anormaux
Audio. Série. « La Nuit des féminismes 1/2 : Quelques pionnières… » : Épisode 4/10 : Madeleine Pelletier, une femme d’avant-garde
Les Nuits de France Culture, France Culture, 16 novembre 2021 (1ère diffusion 7 février 2021), 60′
D’une guerre à l’autre : ambivalences de la modernité (1914-1939)
(Source : Parisiennes citoyennes ! Engagements pour l’émancipation des femmes (1789-2000)
En 1914-1918, les Françaises participent massivement à l’effort de guerre; beaucoup assument une autonomie nouvelle. Mais le moment est loin d’être favorable au féminisme. Alors que de nombreux pays reconnaissent l’égalité des droits politiques en accordant le droit de vote aux femmes, les Françaises se heurtent à un refus persistant du Sénat.
Leur légitimité dans le monde du travail n’est pas mieux acceptée, et la crise des années 1930 le rappelle en les touchant de plein fouet. De plus, la baisse de la natalité inquiète les autorités, qui combattent l’avortement et mettent en place des politiques familialistes.
Malgré l’âpreté politique et sociale de la période, Paris vit une véritable révolution des mœurs. Les garçonnes des Années folles troublent la frontière entre le masculin et le féminin. Voici la « femme moderne », qui vit avec son temps.
Les engagements des femmes à Paris prennent des directions multiples. Le droit de vote comme la cause pacifiste mobilisent les militantes. Pendant le Front Populaire, les femmes participent massivement à la grève générale, et trois femmes (Cécile Brunschvicg, Irène Joliot-Curie et Suzanne Lacore) entrent au gouvernement.
Face à la guerre
La Grande Guerre, par sa longueur et son intensité dramatique, a été une véritable épreuve pour la différence des sexes. D’interprétation difficile, du reste. Au premier abord, elle est, jusque dans sa symbolique, remise en ordre des sexes, les hommes au front, les femmes à l’arrière. Ils combattent ; elles les secondent, les remplacent, les soignent, les attendent , les pleurent. Mais en même temps, elle s’immiscent dans des lieux ou des tâches masculines dont elles se tirent fort bien. Elles conduisent charrues, voitures et tramways. Les « munitionnettes » tournent des obus dans les usines d’armement. Les femmes gèrent leur budget, manient l’argent, reçoivent de meilleurs salaires. Elles font grève pour leur augmentation : en 1915, en 1917, elles manifestent à Paris, de leur propre initiative. Elles vont et viennent, fument, louchent surs bas de soie, soupçonnent leur fidélité. Rupture d’habitudes et d’évidence, la sexualité de guerre est problématique.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.
En 1914, le mouvement pour l’émancipation des femmes se fracture : une large majorité soutient l’Union sacrée (solidarité face à l’ennemi), une minorité reste pacifiste et internationaliste, mais la censure et l’interdiction de passer les frontières limitent les protestations. En 1917, la répression s’aggrave avec l’arrivée de Clemenceau au pouvoir.
Pendant la guerre, les conditions de travail se sont dégradées, mais en 1915 les féministes, qui défendent de meilleures conditions de travail, permettent aux ouvrières à domicile d’avoir un salaire minimum.
En 1917, les employées et ouvrières de l’habillement entrent en grève, manifestent dans Paris et entraînent celles qui travaillent dans l’armement. Le mouvement menace la machine de guerre. Les préjugés sur la passivité de la main-d’œuvre féminine sont dépassés, et le gouvernement doit plier. La presse souligne une incontestable victoire du féminisme.

Contre l’alcool le taudis la guerre… : Les françaises veulent voter
David Burnand Chavannaz, vers 1920
Voir aussi : Les suffragettes
Danielle Tartakowsky
Histoire par l’image

« Femmes, unissez-vous contre la guerre ! », 1929. Ligue Internationale des femmes pour la paix et la liberté, section française. Affiche. Ville de Paris / Bibliothèque historique de la Ville de Paris.
Voir aussi :
Femmes pendant la Première Guerre mondiale
Wikipédia
Le rôle des femmes pendant la Première Guerre mondiale
Ville de Paris, 7 novembre 2022
Le travail des femmes pendant la Première Guerre Mondiale
Charlotte Delory, régisseuse des collections
Musée de la Grande Guerre, 18 octobre 2021
Femmes engagées : militantes, espionnes, philanthropes et militaires
Charlotte Delory, régisseuse des collections
Musée de la Grande Guerre, 19 janvier 2022
La guerre est-elle émancipatrice pour les femmes ?
Françoise Thébaud
EHNE (Encyclopédie d’histoire numérique de l’Europe)
Penser les guerres du xxe siècle à partir des femmes et du genre. Quarante ans d’historiographie
Françoise Thébaud
Clio, n° 39, 2014, 157-182
Féminismes de l’entre-deux-guerres
Après la guerre, il y a une volonté de restaurer l’ordre ancien : national, avec la Chambre « bleu horizon », nationaliste et conservatrice ; et familial. Les hommes, quand ils reviennent, tentent de retrouver leurs prérogatives : au travail, où les femmes doivent souvent céder la place, au foyer, où les retrouvailles s’avèrent difficiles pour ces couples désaccordés. Les divorces sont d’ailleurs nombreux. Décidément, plus rien ne sera comme avant. Les « Années folles » tentent de tourner la page et elles montrent la profondeur de la « crise d’identité sexuelle » (André Rauch), pour les hommes, perturbés, plus que pour les femmes, conquérantes, cheveux coupés et court vêtues. Les femmes paraissent, sous l’angle de l’égalité, les principales bénéficiaires de la guerre qui a, au bout du compte, accéléré une évolution largement commencée auparavant, à la Belle Époque.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.
Malgré leur participation à l’effort de guerre, les Françaises restent privées de droits politiques ; le Code civil les maintient sous tutelle. Les pouvoirs publics veulent un retour à l’ordre « naturel » des sexes.
Des politiques natalistes sont mises en place, avec, notamment, une forte répression de l’avortement (lois de 1920 et 1923) et la glorification des familles nombreuses. Dans ce contexte, les féminismes étendent leur influence, se diversifient – de la droite catholique à la gauche révolutionnaire – au service de causes multiples, mais leur objectif premier reste la citoyenneté.
Les mouvements féministes ne parviendront pas à leurs fins, malgré leur indéniable force. Le Conseil national des femmes françaises réunit, en 1925, 165 associations et 150 000 adhérentes. L’Union française pour le suffrage des femmes atteint les 100 000 membres en 1929. Et des suffragettes font l’actualité avec des coups d’éclat à Paris.
La Femme doit voter : à temps nouveaux, suffrage nouveau
Maurice Barbey (vers 1880-après 1939), 1925-1928
Affiche – Ville de Paris / Bibliothèque Marguerite Durand

Manifestation pour le droit de vote des femmes devant le Sénat,
1er juillet 1928
Carte postale – Ville de Paris/
Bibliothèque Marguerite Durand

Pancarte suffragiste saisie par une manifestante, 1928
Pancarte – Archives de la préfecture de police de Paris

Le Sénat, qui s’oppose à l’égalité des droits politiques (alors que l’Assemblée y est favorable depuis 1909), devient pour les suffragettes la cible principale. Bravant l’interdiction de manifester, elles se réunissent en petits groupes devant le bâtiment avec des pancartes et des banderoles portant des messages : « Manifestation féministe interdite !!! Vive la liberté !!! ». Le 13 novembre 1928, les avocates Andrée Lehmann et Simone Weiler y sont arrêtées pour «délit de stationnement».
A l’instigation de Louise Weiss, des manifestantes s’enchaînent aux grilles du Sénat et brisent elles-mêmes symboliquement leurs liens.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.
La Femme nouvelle. Citoyens et citoyennes du 18e arrondissement! [appel à voter Louise Weiss pour les élections municipales du 5 mai 1935]
Maurice Bernard, imprimeur, [1935]
Affiche. Ville de Paris / Bibliothèque Marguerite Durand

La journaliste Louise Weiss crée en 1934 La Femme nouvelle et ouvre une boutique suffragiste sur les Champs-Élysées. Depuis les terrasses de café, avec des cartons à chapeaux servant d’urnes, elle invite à voter pour le principe du suffrage des femmes ou pour elle.
À Montmartre, elle recueille 16 852 bulletins son nom. Avec humour, elle mène des actions spectaculaires. Le 5 mai 1935, elle jette de la poudre de riz aux agents venus l’arrêter : ses méthodes de suffragette irritent parfois les militantes modérées.
Voir aussi :
Louise Weiss
Wikipédia
Louise Weiss, à la poursuite d’un monde nouveau
Alice Sageta
Bnf Gallica, Journée internationale des droits des femmes, 4 mars 2019
Louise Weiss : l’Europe, le féminisme et le journalisme
CIIE (Centre d’Information sur les Institutions Européennes)
Série « La Nuit des féminismes 1/2 : Quelques pionnières… » : Épisode 8/10 : Louise Weiss : « Ma campagne d’ironie a duré près de quatre ans : chaque semaine, je paraissais sur les écrans des actualités avec les suffragettes »
France Culture, 23 novembre 2021 (1ère diffusion7 février 2021), 29′
« Ici on vote pour Mme Finat », campagne de Denise Finat pour les élections législatives, 1936 – Affiche – Ville de Paris / Bibliothèque Marguerite Durand

Jeanne Bouvier, 2 mai 1922
Agence de presse Meurisse
Photographie @ Bibliothèque nationale de France
La conquête d’un salaire minimum pour les travailleuses à domicile, ouvrières les plus exploitées, est une réussite collective. Les féministes y ont leur part, comme Jeanne Bouvier (1865-1953). Elle s’engage en 1910 et représente la CGT au premier Congrès international du travail domicile. Nommée au Conseil supérieur du travail, active au sein de l’Office français du travail domicile, créé par Gabrielle Duchêne, elle contribue à l’élaboration de la loi votée le 10 juillet 1915 qui instaure la négociation d’un salaire minimum.

Voir aussi :
Jeanne Bouvier
Wikipédia
BOUVIER Jeanne, Marie par Gilles Pichavant, version mise en ligne le 3 novembre 2010, dernière modification le 5 octobre 2022
Dictionnaire biographique Le Maitron, mouvement ouvrier, mouvement social
Jeanne Bouvier, syndicaliste au service d’un féminisme social
Anthony Cerveaux
BnF Gallica, 24 mai 2021
Série 19/20. Ces femmes qui ont transformé l’économie : Jeanne Bouvier, syndicaliste autodidacte
Alternatives économiques, 13 août 2020 (Abonné.e.s)
Le Paris des garçonnes
Deuil, anxiétés, mais aussi modernité et besoin de s’amuser: le climat de l’après-guerre est contrasté. Une atmosphère de libération sexuelle anime le Paris de la fête et de la bohème.
En 1922, Victor Margueritte en peint sa version dans La Garçonne, dont le succès scandaleux lui coûte sa légion d’honneur. Le « Paris-Lesbos » défie la morale puritaine et l’ordre patriarcal. La capitale de la France, où l’homosexualité n’est pas légalement condamnée, est un espace propice à l’émancipation.
L’avant-garde littéraire pivote autour de couples de femmes de la Rive gauche : Gertrude Stein et Alice Toklas, Sylvia Beach et Adrienne Monnier… Nombre de lesbiennes étrangères trouvent à Paris leur épanouissement amoureux et professionnel. «Il ne faut pas chercher Sapho ni à Mytilène, ni à Leucade, ni à Alexandrie, ni même dans les couvents… C’est une artiste. Donc elle a déménagé à Paris» écrit Maryse Choisy dans un numéro du Rire consacré aux «Dames seules» en 1932.
Garçonnes
Les premières à se couper les cheveux furent les étudiantes russes des années 1870-1880 qui pénètrent dans les facultés de médecine pour s’occuper de la santé du peuple. Libération politique, libération des mœurs, affirmation d’un saphisme androgyne ou d’une extrême féminité. Autour de 1900, le féminisme européen, très vigoureux, se développe et revendique l’affranchissement du corps. Les corsets tombent, les jupes se raccourcissent ainsi que les cheveux. La guerre accélère le mouvement. Pour les commodités du travail, infirmières, ambulancières, conductrices de tramway, « munitionnettes » des usines de guerre se modernisent. Après la guerre, la nouvelle coupe se généralise avec des variantes : cheveux frisés ou coupe raide. Cette dernière donne aux femmes une allure de garçonne guère prisée par des membres de la haute-couture qui résiste à cette masculinisation (Worth, Vionnet, Poiret) mais une allure appréciée par d’autres – des femmes surtout – qui éprouvent un sentiment de libération.
Plusieurs tendances s’affirment : la jeunesse, la modernité, la volonté de s’émanciper des modes d’autrefois, du monde d’avant-garde mort avec elles. Un désir de légèreté propice au sport. De libération sexuelle : les lesbiennes soutiennent cette mode qui leur convient si bien.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.

Dans les années 1920, les jeunes Parisiennes révolutionnent la mode en s’appropriant des codes de l’apparence masculine : cheveux courts, allure filiforme, abandon du corset et des robes à traîne. Ces garçonnes affirment aussi un état d’esprit : elles sortent, fument, dansent, pratiquent une activité sportive ! Mais cette nouvelle mode, jugée scandaleuse, est porteuse à son tour de contraintes, quand la presse et les publicités s’en emparent, valorisant la minceur et la jeunesse. Loin de cette exploitation commerciale, des artistes comme Claude Cahun questionnent les apparences associées aux genres féminin et masculin.
Une silhouette androgyne se dessine. Des vêtements nouveaux apparaissent : le chapeau cloche, le tailleur (Chanel), la jupe-culotte, le pantalon, ainsi que des attitudes nouvelles, comme fumer, conduire une voiture, lire son journal en public, aller au café. Nouvelle sexualité dans une vague d’homosexualité qui concerne toute l’Europe. De nouveaux types de femmes surgissent, souvent en couple : Colette et la baronne de Zuylen, Sylvia Beach et Adrienne Monnier, Gertrude Stein et Romaine Brooks, Claude Cahun etc.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.
Voir aussi :
La garçonne des années 1920, une figure ambivalente
Christine Bard, Professeure d’histoire contemporaine, Université d’Angers
The Conversation, 15 septembre 2022
Les garçonnes des années 1920, des figures subversives et résolument modernes
Christine Bard
Slate, 13 octobre 2021
La mode des années 20 : la garçonne, la coupe au carré et les autres tendances qui ont défini les Années folles. Tour d’horizon des tendances mode des années 1920
Lilah Ramzi
Vogue, 6 juin 2024
La mode à la plage : de l’émancipation à la libération
Marina Bellot
RétroNews, 20 août 2018, modifié le 17 juillet 2024 (Abonné.e.s)
Garçonne (mode)
Wikipédia
Audio. Série « 1918, après la guerre les années folles » : Épisode 4/4 : La Garçonne, une femme des années 20
LSD, La série documentaire, France Culture, 15 novembre 2018, 55′

Autoportrait, vers 1928 – Lucy Schwob, dite Claude Cahun (1894-1954)
Photographie – Courtesy of the Jersey Heritage Collections
Claude Cahun est une artiste surréaliste qui participe aux revues homosexuelles Inversions et Amitiés. Avec sa compagne, Suzanne Malherbe, dont le pseudonyme est Marcel Moore, elle s’installe en 1922 à Montparnasse, 70, bis rue Notre-Dame-des-Champs. Elles travaillent ensemble à la création d’autoportraits qui troublent les identités de genre.
Voir aussi :
Claude Cahun
Wikipédia
Claude Cahun
AWARE
Lily [sic]. Portrait de Lili Wegener, 1922
Gerda Wegener (1886-1940)
Peinture – Centre Pompidou, Paris, Musée national d’art moderne – Centre de création industrielle
Le modèle, Lili Wegener, a épousé en 1904 la peintre Gerda Gottlieb. En 1912, le couple s’installe à Paris, au Champ-de-Mars, profitant du climat de liberté qui règne dans la bohème artistique parisienne. Soutenue par l’amour de son épouse, dont elle est le modèle privilégié, Lili est la première femme transgenre opérée et ayant obtenu un changement d’identité.

Voir aussi :
Lili Elbe
Wikipedia
Gerda Wegener, peintre amoureuse de la première femme transgenre
Malika Bauwens
Beaux Arts, 7 avril 2023
Gerda Wegener
AWARE

Boîte de nuit à Paris, « Le Monocle», cabaret féminin, 1933
Gyula Halåsz Brassaï (1899-1984)
Photographie – Estate Brassaï Succession
Certaines lesbiennes affichent ici des signes de masculinité : cheveux courts lissés par la gomina, pantalon, veste, cravate. Elles se retrouvent au Monocle, cabaret ouvert en 1932 par Lulu de Montmartre dans une ruelle de la Butte. Brassaï, photographe fasciné par le Paris nocturne, a réalisé une série de portraits des habituées de ce cabaret qui déménage ensuite au 60, boulevard Edgar-Quinet (14e arr.).
Voir aussi :
Le Monocle (bar lesbien)
Wikipédia
Violette Morris (1893-1944) brille dans de nombreuses disciplines : nage, cyclisme, waterpolo, lancer de poids, football, javelot, disque, course automobile, boxe… Sa popularité semble un temps protéger ses transgressions : son genre masculin, son ablation des seins, son homosexualité… Un bien mauvais exemple pour la jeunesse estime la Fédération sportive féminine de France, qui prononce son exclusion.
Violette Morris porte alors plainte, mais perd son procès, en 1930, l’accusation s’appuyant sur l’interdiction du port du pantalon.
Voir aussi :
Violette Morris
Wikipédia
Violette Morris, parcours d’une scandaleuse
Claire Lemesle
BnF Gallica, 2 décembre 2015
Audio. Violette Morris, la scandaleuse
Les premières, France inter, 9 août 2020, 3′
Premières femmes à porter un pantalon publiquement en 1933
place de la Concorde à Paris, en France, 1933
Agence Keystone
Photographie copyright Keystone-France / GAMMA RAPHO

Cette photographie produite par une agence est issue d’une série sur « les jeunes Parisiennes en pantalon ». C’est une image de commande, mise en scène, avec une légende trompeuse. Elle ne reflète en rien la réalité de l’habillement des femmes à Paris, où le port du pantalon reste très rare. La production et la diffusion de ce type d’images témoignent néanmoins d’un intérêt médiatique pour la visibilité et l’émancipation des femmes dans l’espace public.
Voir aussi :
Le droit au pantalon. Du pittoresque au symbolique
Christine Bard
Collège de France, La Vie des idées, 1er mars 2013

L’aviatrice suffragiste Maryse Bastié (1898-1952), 1930
André Kertész (1894-1985)
Photographie – Médiathèque du patrimoine et de la photographie
Voir aussi :
Maryse Bastié
Wikipédia
Maryse Bastié
Françaises, Français, France bleu, 11 mai 2017, 2′
Citoyennes au temps du Front populaire
La crise économique des années trente affecte brutalement l’emploi des femmes. Une campagne sans précédent est déclenchée pour le retour des femmes au foyer. La dynamique de l’émancipation des femmes est remise en cause. Mais la grève générale de 1936 mobilise la main-d’œuvre jeune, féminisée, mal payée et peu syndiquée.
Dans le chapitre relatif au travail des femmes, Michelle Perrot aborde la condition des ouvrières à l’usine. Le travail à l’usine est cyclique, sans perspective de carrière. En effet, les ouvrières entrent très jeunes à l’usine, y restent jusqu’à leur mariage ou à la naissance de leur premier enfant ; quitte à y revenir plus tard, quand les enfants sont élevés, et, au besoin avec eux. C’est un travail peu qualifié, monotone, réduit à des gestes simples et répétitifs mais dont les cadences s’accélèrent de plus en plus. Les machines sont mal protégées, les accidents fréquents. Les journées sont très longues. Les locaux sont inconfortables. Il n’y a pas de réfectoires. la discipline est sévère. C’est aussi un travail contraint. Le harcèlement sexuel fait partie des motifs de grève.
Les femmes sont nombreuses dans les industries alimentaires, chimiques et dans les manufactures de tabac. En revanche, elles sont rares dans la métallurgie, la construction mécanique, métiers virils plus qualifiées. Dans l’imprimerie, les ouvriers s’opposent même à leur introduction, considérée comme dévalorisante. Les métiers du Livre sont nobles donc masculins.
La Première Guerre mondiale change les choses. L’arrivée massive des « munitionnettes » oblige les usines à accélérer la division du travail et à réorganiser leur espace, avec création de chambres d’allaitement et introduction de surintendantes d’usine dont les rapports constituent un précieux témoignage sur les femmes en usine. C’est un processus irréversible.
Les ouvrière se banalisent. Elles poursuivent des carrières plus longues, à peine interrompues par les congés de maternité que la législation commence à protéger. C’est là qu’elles vivent le Front populaire. On les voit nombreuses dans les manifestations avec leurs cheveux courts. Elles participent aux occupations d’usine, gèrent les cantines et dansent dans les bals. Quelques-unes s’enhardissent jusqu’à prendre la parole : des photos les montrent haranguant leurs camarades.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.

Rose Zehner dans l’atelier de sellerie de l’usine Citroën quai de Javel, mars 1938
Willy Ronis (1910-2009)
Photographie – Médiathèque du patrimoine et de la photographie
La militante communiste et syndicaliste Rose Zehner (1901-1988) s’adresse aux ouvrières de Citroën à la veille d’une grève de protestation contre le recul des acquis sociaux. Willy Ronis se souvient : « Les gens criaient de colère. Je n’ai pas eu une vraie réaction de reporter : l’atmosphère était tellement tendue que je me suis senti de trop et suis parti. Je n’ai fait qu’une photo, celle-là. » Licenciée après cette grève, Rose Zehner ouvre un bistrot.
Voir aussi :
Rose Zehner
Wikipédia
ZEHNER Rose [née GODEREL Rose, Francine] par Claude Pennetier, version mise en ligne le 22 octobre 2013, dernière modification le 2 novembre 2022
Dictionnaire biographique Le Maitron, mouvement ouvrier, mouvement social
Les acquis sociaux obtenus en juin 1936 (40 heures par semaine, 15 jours de congés payés) bénéficient à toutes et tous, mais la différence de salaires selon le sexe est maintenue : les ouvrières sans qualifications sont payées entre 25 % et 40 % de moins que les hommes…
Le gouvernement de Léon Blum nomme aussi trois femmes secrétaires d’État : Irène Joliot-Curie, Suzanne Lacore et Cécile Brunschvicg. Elles sont pourtant privées de droits politiques en tant que femmes, et sans droits civils pour celles qui sont mariées. « Trois hirondelles ne font pas le printemps », commente Louise Weiss.
Voir aussi :
Les femmes sous le Front populaire : quelques victoires et des désillusions
Marina Bellot
RetroNews, 7 décembre 2021, modifié le 4 janvier 2022 (Abonné.e.s)
Louis-Pascal Jacquemond, L’Espoir brisé. 1936, les femmes et le Front populaire
Préface de Michelle Zancarini-Fournel, Paris, Belin, 2016, 437 p.
Siân Reynolds
Clio. Femmes, Genre, Histoire, 2020/1, n° 51, p. 337
Audio. « L’espoir brisé, 1936, les femmes et le front populaire » de Louis-Pascal Jacquemont
A vous de lire, France bleu, 26 juin 2016, 3′
Audio. Série « 1936, un Front populaire pour le pain, la paix et la liberté » : Épisode 1/4 : Les espoirs des femmes du Front Populaire
La Fabrique de l’Histoire, France Culture, 27 juin 2016, 26′
Audio. Documentaire : en 1936, trois femmes au gouvernement
France Inter, 9 mars 2021, 3′
Ministres pionnières du Front populaire
Médiapart, 18 août 2024 (Abonné.e.s)
4 épisodes
Entre phobie des grèves et antisémitisme débridé à droite et crainte d’un suffrage féminin sous influence cléricale à gauche, l’étau français dessert le féminisme. Avec Irène Joliot-Curie, Cécile Brunschvicg et Suzanne Lacore, le Front populaire sera une timide rampe de lancement féministe. Plongée dans les archives du début d’une émancipation politique.
Les liens de la sororité
Entre les deux guerres, les réseaux de femmes se multiplient dans la capitale. Les salons, comme celui de Natalie Barney dédié à la culture lesbienne, ou celui des sœurs Nardal consacré à la négritude, prospèrent. Librairies et bibliothèques offrent des possibilités de rencontres, à la librairie Shakespeare and Co, fondée par l’Américaine Sylvia Beach, ou à la Bibliothèque Marguerite Durand, « office de documentation féministe ».
En ces temps où l’accès des femmes aux études et au monde du travail qualifié progresse, les associations et clubs professionnels non mixtes se structurent à Paris, la capitale servant généralement de siège national. La dynamique féministe encourage les femmes à cultiver l’amitié, la solidarité et la sororité, face aux règlements qui les excluent toujours de nombreux clubs et réseaux masculins.
Les « Années folles » marquent dans les grandes capitales européennes, l’explosion d’une homosexualité beaucoup plus joyeuse et libérée, où les lesbiennes sont très présentes. Citons, parmi les plus connues, Gertrude Stein, Romaine Brooks, Adrienne Monnier et Sylvia Beach. Nous savons qu’elles s’aimaient, qu’elles avaient du plaisir à être ensemble, qu’elles alliaient jouissance et création.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.

Portrait de Natalie Clifford Barney (1876-1972), femme de lettres, dit « L’Amazone », 1920
Romaine Brooks
© Paris Musées / Musée Carnavalet – Histoire de Paris.
L’Américaine Natalie Clifford Barney, comme sa compagne, Romaine Brooks, ont trouvé à Paris un havre de paix pour vivre leurs amours féminines multiples. Expatriées et fortunées, elles ne craignent pas de défier la morale dominante et leur liberté paraît sans limites. Dans Éparpillements, recueil d’aphorismes (1910), Natalie Clifford Barney juge que « la vie la plus belle est celle que l’on passe à se créer soi-même et non à procréer »
Voir aussi :
Natalie Clifford Barney
Wikipédia
« Pourquoi m’en voudrait-on d’être lesbienne ? » : Natalie Clifford Barney, l’Amazone de la rue Jacob
Zineb Dryef
Le Monde, 5 août 2022 (Abonné.e.s)
Vidéo. La “Correspondance amoureuse” de Natalie Clifford Barney et Liane de Pougy
École nationale des chartes – PSL, YouTube, 23 octobre 2020, 1 21’09
Romaine Brooks
Wikipédia
Romaine Brooks
AWARE
Manteau non griffé ayant appartenu à Natalie Clifford Barney, vers 1937-1939
Palais Galliera – musée de la Mode de la Ville de Paris

Groupe de La Revue du monde noir,
devant le 7 de la rue Hébert, Clamart, 1932

Le salon des sœurs Nardal, issues d’une famille bourgeoise martiniquaise, accueille l’intelligentsia noire et la revue Le Monde Noir (1931-1932). L’aînée, Paulette, arrivée à Paris en 1920, première étudiante noire la Sorbonne, prend des positions anticolonialistes et féministes. La création de ce salon correspond à une plus forte présence des Noirs, en particulier des Afro-Américains, Paris, mais aussi l’émergence du concept de négritude, à laquelle les femmes ne sont pas étrangères.

La Revue du Monde Noir n° 6, avril 1932
Revue -Musée du Quai Branly – Jacques Chirac
Voir aussi :
Jane Nardal
Wikipédia
Paulette Narval
Wikipédia
Audio. Paulette Nardal, la négritude et ses sœurs (1896 -1985)
Toute une vie, France Culture, 23 juillet 2023 (1ère diffusion 26 mars 2022), 58′
La conscience noire avec les sœurs Nardal
france.tv
Audio. Les sœurs Nardal, phénomène éditorial
La Marche du monde, RFI, 2 juin 2024
De la Résistance à mai 68 : entre deux vagues (1939-1968)
(Source : Parisiennes citoyennes ! Engagements pour l’émancipation des femmes (1789-2000)
L’expérience française de l’Occupation et du régime de Vichy fournit un exemple du retour à l’ordre sexuel. On connaît la devise de Pétain : « Travail, Famille, Patrie. » Elle s’accompagnait d’une politique nataliste, hostile au travail des femmes, à la fois répressive et incitative. Un décret de l’automne 1940 (en fait peu appliqué en raisons des besoins) exclut les femmes mariée de la fonction publique : retour au foyer. L’avortement fut sévèrement puni. En 1943, une femme fut condamnée à mort et exécutée pour ce fait; C’était le retour au début du XIXème siècle. On célébrait la Mère : on pérennisa la fête des Mères, introduite dans les années 1920. On rendit obligatoire un programme d’enseignement ménager et de puériculture dans les établissement féminins. On vénérait la Vierge : Notre-Dame de Boulogne circulait de ville en ville, dans un esprit de mission expiatoire. On favorisait l’enseignement privé, où les religieuses « sécularisées » pouvaient reprendre le voile. On encourageait les associations familiales. Une partie des femmes culpabilisées, de la France défaite se laissèrent séduire.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.
La défaite de 1940 enclenche une phase de régression pour les droits des femmes. C’est toutefois en citoyennes que certaines s’engagent dans la Résistance. Leur courage justifie la reconnaissance de l’égalité des droits civiques, en 1944. Mais le rôle alloué aux femmes dans la vie politique reste modeste. En revanche, dans les associations et les syndicats, les engagements féminins sont multiples.
Le baby-boom et le conservatisme moral dominant conduisent les femmes à chercher la conciliation entre vie professionnelle, personnelle et maternité. Parallèlement, le modèle familial traditionnel est critiqué par Simone de Beauvoir, qui publie Le Deuxième Sexe en 1949.
En 1961, la lutte pour le droit à la contraception se traduit par l’ouverture à Paris d’un centre de Planning familial. Des « scandaleuses » telles que Juliette Gréco et Françoise Sagan annoncent les changements à venir. D’autres embrassent la dissidence politique et prennent des risques en soutenant l’indépendance algérienne. Puis, dans l’effervescence de Mai 68, les femmes prennent conscience que, dans les manifestations, les assemblées générales ou les grèves, leur voix compte toujours moins que celle des hommes.
Citoyennes en Résistance
Dans l’ensemble, les femmes résistèrent. La majorité se contenta d’une sourde obstruction, arme puissante, plutôt dans la société civile. Les jeunes filles, notamment, menèrent sourdement leur existence. D’autres s’engagèrent dans la Résistance, avec les armes des femmes, le secret, l’accueil, le transport, la transmission ; plus rarement dans l’action politique ou militaire. on a tardivement reconnu le rôle de ces « combattantes de l’ombre ».
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.
Dans la France de Vichy, les changements législatifs restreignent les droits des femmes et des minorités sexuelles suivant un tournant pris dès les années 1920.
À Paris comme ailleurs, mouvements et réseaux de résistance gagnent en importance entre 1940 et 1944. Ils veulent libérer le territoire de l’occupant, encourager le patriotisme, dénoncer la barbarie nazie, défendre les valeurs démocratiques, réagir aux persécutions antisémites… Les femmes y sont bien présentes, même si le pouvoir reste masculin. Le Parti communiste (interdit en 1939), qui attire bon nombre d’opposantes au régime du maréchal Pétain, est à l’origine du seul mouvement féminin créé sous l’Occupation : l’Union des femmes françaises.
12 % des cartes de combattants volontaires de la résistance sont attribuées à des femmes, mais de nombreuses résistantes ne l’ont pas demandée.

Sac à double paroi appartenant à Lise London (1916-2012), 1942
Nelly Schweld
Accessoire. Musée de la Résistance nationale, Champigny-sur-Marne
Réalisé par une résistante formée à la reliure aux Arts et Métiers et agente de liaison, ce sac à double paroi très astucieux trompe la police lorsque Lise London, capitaine des Francs-tireurs et partisans, qui y cache des documents clandestins, est arrêtée et fouillée. Après une semaine d’interrogatoires à la préfecture de police de Paris, le sac lui est rendu. Lise London peut enfin en détruire le contenu en le mangeant devant ses compagnes de détention.
Avis de recherche de Madeleine Marzin après son évasion, gare Montparnasse, le 17 août 1942 (détail)
Archives de la préfecture de police de Paris.
Le 31 mai 1942, rue de Buci (6e arr.), des manifestantes, dont Madeleine Marzin (1908-1998), institutrice syndicaliste et communiste, envahissent un magasin et distribuent des vivres pour protester contre le rationnement, les privations et stimuler l’esprit de résistance. Arrêtée par la police, elle s’échappe, part dans l’Est organiser des comités féminins, puis revient pour participer à la Libération de Paris. Elle poursuit son engagement au Conseil général de la Seine et au Parlement en tant qu’élue de Paris.

Voir aussi :
Audio. Les femmes dans la Résistance
France Inter, 9 octobre 2011, 54′
Audio. Les Résistantes
10 épisodes
Philippe Collin
France inter, 5 décembre 2023, 54′
Les femmes résistantes méconnues débarquent enfin sur Wikipédia
l’Humanité, 28 janvier 2025
Marie-Claude Vaillant-Couturier
Wikipédia
Audio. Marie Claude Vaillant Couturier
Création on air, France Culture, 10 février 2016, 59′
Lucie Aubrac
Wikipédia
Audio. Hommage à Lucie Aubrac, une femme en résistance
La Fabrique de l’Histoire, France Culture, 16 décembre 2007, 54′
Geneviève de Gaulle-Anthonioz
Wikipédia
Audio. Série « 1945 : 75 ans après » : Épisode 7/8 : Geneviève de Gaulle-Anthonioz (1920-2002), la dignité et l’espérance
Toute une vie : 40 figures de la culture, France Culture, 15 août 2020, 58′
Charlotte Delbo
Wikipédia
Audio. Série « 1945 : 75 ans après » : Épisode 6/8 : Charlotte Delbo (1913-1985)
Toute une vie : 40 figures de la culture, France Culture, 8 août 2020, 58′
Joséphine Baker
Wikipédia
Audio. Joséphine Baker (1906-1975), une artiste très engagée
Toute une vie, France Culture, 27 novembre 2021, 58′
Germaine Tillion
Wikipédia
Audio. Germaine Tillion, l’héroïne
5 épisodes
A voix nue, France Culture, du 1er au 5 août 2022, 25′
Audio. Claude Cahun et Marcel Moore : une résistance surréaliste
2 épisodes
Une histoire particulière, un récit documentaire en deux parties, France Culture, du 12 au 13 juin 2021, 28′ chacun
Madeleine Riffaud
Wikipédia
Madeleine Riffaud
CHRD de Lyon
Audio. Madeleine Riffaud, la mémoire sauve
10 épisodes
Les Nuits de France Culture, France Culture, du 11 juillet au 31 août 2015, 59′ chacun
La guerre est-elle émancipatrice pour les femmes ?
Françoise Thébaud
EHNE (Encyclopédie d’histoire numérique de l’Europe)
Penser les guerres du xxe siècle à partir des femmes et du genre. Quarante ans d’historiographie
Françoise Thébaud
Clio, n°39, 2014, pp. 157-182
Les espoirs de la Libération
En 1945, au sein du Conseil municipal de Paris, alors majoritairement à gauche, les conseillères sont environ 12%. C’est plus que le pourcentage de femmes à l’Assemblée nationale ou au Conseil général de la Seine (environ 5%). Le Parti communiste est le parti le plus féminisé. Ses élues parisiennes sont des militantes chevronnées, issues de la Résistance, avec de riches parcours associatifs (à l’Union des femmes françaises, notamment) et politiques. Plusieurs ont des mandats nationaux.
Moins nombreuses, les élues catholiques les plus progressistes sur le plan social sont actives au sein du Mouvement républicain populaire. L’Union féminine civique et sociale investit le terrain politique et ouvre, dès novembre 1944, un centre de formation civique pour les femmes à l’Institut catholique de Paris. La modernité de ces apprentissages citoyens entre souvent en conflit avec le discours conservateur du clergé.

«Je ne vote pas (toujours)…», 1950. Union féminine civique et sociale
Claude Verrier (1919-2004)
Affiche. Centre des Archives du féminisme, université d’Angers.
Cette affiche qui témoigne d’un souci de communication efficace et moderne manie l’humour, en réponse aux détracteurs du vote des femmes. Elle légitime les électrices comme des sujets politiques conscients de réalités spécifiquement liées à l’expérience de la plupart des femmes, et qui ne votent pas nécessairement comme leur mari ou leur père ! Elle émane d’une association catholique, l’Union féminine civique et sociale, ayant longtemps défendu le vote familial au détriment du vote féminin.
La Fédération démocratique internationale des femmes, d’obédience communiste, est fondée lors du congrès de Paris, entre le 26 novembre et le 1er décembre 1945.
Elle affiche une ambition féministe, prônant « l’égalité complète, en droits, des femmes et des hommes dans tous les domaines de la vie sociale, juridique, politique et économique »
Devant la Snecma (entreprise nationalisée comptant plusieurs usines à Paris et en banlieue) alors en grève, une militante communiste vend Femmes Françaises, journal édité par l’Union des femmes françaises.

Fédération démocratique internationale des femmes
Wikipédia
Les femmes européennes dans les principales organisations internationales de femmes
Francisca de Haan
EHNE (Encyclopédie d’histoire numérique de l’Europe)

Germaine Poinso-Chapuis sortant du Conseil des ministres à l’Élysée, 9 juin 1948
Agence Keystone
Photographie © Keystone-France / GAMMA RAPHO
Cette ancienne résistante est la première femme ministre de plein exercice chargée de la Santé publique et de la Population (24 novembre 1947-26 juillet 1948). Après son départ, elle reste très active sur le plan parlementaire en faisant, entre autres, de nombreuses propositions de loi. Avocates elle a incarné le féminisme et l’engagement politique au sein de la démocratie chrétienne. Elle défend, par exemple, la cause des enfants et des personnes handicapées.
Voir aussi :
Germaine Poinso-Chapuis
Wikipédia
Germaine Poinso-Chapuis, première femme ministre
Michèle Pedinielli
RetroNews, 4 juin 2018
Les scandaleuses
Alors que le féminisme reste au creux de la vague, la littérature, la chanson, la scène échappent en partie au conformisme familialiste et puritain des années cinquante.
Scandaleuse, Simone de Beauvoir, identifiée à la bohème de la rive gauche, incarne désormais la « débauche ». Mais son message éveille les consciences de ses nombreuses lectrices.
Scandaleuses aussi en 1964-1965, les premières Parisiennes qui sortent en minirobes et minijupes, quand d’autres – ou les mêmes – adoptent le pantalon. Précédant la nouvelle vague féministe, le langage vestimentaire parle de libération, sous le regard des photographes qui saisissent ce moment troublant.
Comme une réplique du séisme des Années folles, les années soixante révolutionnent le rapport au corps. Il devient banal de sortir bras nus et de fumer dans la rue ou au café. Paris est l’épicentre et la vitrine de tous ces changements culturels.
Scandaleuses

Après la Seconde Guerre mondiale, les femmes restent souvent enfermées dans un rôle d’épouse, de ménagère et de mère. Dans le livre Le Deuxième Sexe, Simone de Beauvoir questionne ces rôles et leurs poids dans la vie des femmes. Cette réflexion fait l’effet d’une bombe. D’autres personnalités du monde culturel et artistique choisissent une vie indépendante : l’écrivaine Françoise Sagan ou la chanteuse Juliette Greco font scandale par leurs œuvres, mais aussi par leur manière de vivre. La liberté sexuelle de ces femmes est au cœur du scandale : on n’accepte pas les amours libres, la bisexualité ou le choix de ne pas avoir d’enfants.

Gisèle Freund. Simone de Beauvoir, 1948 (photo recadrée).
Photo © Maison Européenne de la photographie / IMEC, Fonds MCC, Dist. RMN-Grand Palais.
Voir aussi :
Simone de Beauvoir
Wikipédia
BEAUVOIR (de) Simone de [de BEAUVOIR Simone, Ernestine, Lucie, Marie BERTRAND] Notice par Sylvie Chaperon, version mise en ligne le 20 octobre 2008, dernière modification le 4 juillet 2022.
Dictionnaire biographique Le Maitron, mouvement ouvrier, mouvement social
Voyages autour de mon cerveau (VADMC)
Blog de Tiphaine Martin, chercheuse spécialiste de Simone de Beauvoir, membre du Comité éditorial des Simone de Beauvoir Studies
Mes dimanches chez Simone de Beauvoir : mémoires d’une jeune fille rebelle
Claudine Monteil
Ampelos, 2023
Audio. Série « La Nuit des féminismes 1/2 : Quelques pionnières… » : Épisode 9/10 : Simone de Beauvoir : « Ce n’est pas de ma faute si, en France en particulier, dès qu’on parle de femmes, on pense immédiatement au sexe ! »
Les Nuits de France Culture, France Culture, 30 décembre 2021 (1ère diffusion 7 février 2021), 25′
La Société internationale Simone de Beauvoir
Simone de Beauvoir Studies
Voir aussi :
Juliette Gréco
Wikipédia
Audio. Juliette Gréco (1927-2020), le feu de la liberté
Toute une vie : France Culture, 6 mars 2021, 58′
Juliette Gréco. Icône du cinéma et de la chanson française
Françoise Sagan
Wikipédia
Audio. Françoise Sagan, l’affranchie
4 épisodes
La Compagnie des auteurs, France Culture, 59′ chacun
Renouveaux au creux de la vague
Les revendications des femmes dans le monde du travail trouvent, à partir de 1965, un écho au ministère du Travail. Un Comité d’études et de liaison des problèmes du travail féminin se met en place, présidé par Marcelle Devaud. Il est à l’origine du « féminisme d’État ». Le taux d’activité des Françaises est en hausse, c’est aussi la fin du baby-boom.
Au quotidien, l’une des préoccupations majeures des femmes est de concilier maternité et épanouissement personnel ou professionnel. C’est dans ce contexte que naît en 1956 l’association Maternité heureuse, devenue Mouvement français pour le Planning familial en 1960.
La situation politique est tendue dans un contexte de décolonisation, une cause qu’embrassent un certain nombre de Parisiennes : porteuses de valises, militantes communistes, intellectuelles, avocates ou encore artistes.
Maîtresses de leur corps

Le droit à la contraception, c’est-à-dire d’éviter une grossesse non désirée, et le droit à l’avortement sont au cœur de l’émancipation des femmes. Disposer de son corps est indispensable pour mener librement son existence. L’association Maternité heureuse donne naissance au Planning familial, qui informe sur la contraception et sur l’IVG (interruption volontaire de grossesse). Un centre de Planning familial ouvre à Paris en 1961. Grâce à la mobilisation militante, la contraception est autorisée en 1967 et le droit à l’IVG en 1979. Il existe aujourd’hui en France, et notamment à Paris, de nombreux centres de Planning familial.
Le Planning familial, dont le précurseur est le Birth Control, est développé en France après la guerre, au milieu des années 1950, par Évelyne Sullerot et la doctoresse Lagroua-Weill-Hallé, créatrices de « Maternité heureuse », d’ailleurs hostiles à l’avortement, sujet qui les opposa ultérieurement au MLAC (Mouvement pour la liberté de l’avortement et de la contraception).
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.

Jeune couple en consultation à la Maternité heureuse, 1956
Janine Niépce (1921-2007)
Photographie – Hélène Jaeger-Defaix copyright Janine Niépce / Roger-Viollet
Il suffit d’écouter les femmes
Entretiens patrimoniaux, INA
En janvier 2025, pour le cinquantième anniversaire de sa promulgation, la loi Veil voit disparaître la génération de femmes qu’elle a littéralement sauvées. Avant qu’il ne soit trop tard, l’INA est allé recueillir 79 entretiens filmés aux quatre coins de l’hexagone et dans les Outre-mer. Si elle vise à constituer un corpus de documents audiovisuels représentatifs de la diversité des expériences vécues, cette « collecte patrimoniale » ne prétend pas à l’exhaustivité. Pensés comme les « archives de demain », les récits sélectionnés cherchent à refléter l’époque, la pluralité des territoires, des origines, des méthodes abortives. Celles qui ont « bricolé » toutes seules, celles qui ont « débrouillé » leurs amies, celles qui ont pris la route la peur au ventre. Celles qui ont failli mourir. Celles qui ont perdu leur mère, ceux qui ont perdu leur femme, ceux qui ont pris des risques pour opérer les femmes, ceux qui ont défendu les accusées. Entamé en janvier 2022 sous la houlette de l’historienne Bibia Pavard et d’un comité scientifique transdisciplinaire, ce projet mémoriel a nécessité un appel à témoins national, ainsi qu’un fourmillant travail d’enquête.
Voir aussi :
Mouvement pour la liberté de l’avortement et de la contraception (MLAC)
Wikipedia
C’était quoi le MLAC, le mouvement qui a lutté pour le droit à l’avortement ?
INA, 29 décembre 2022
Histoire(s) du MLAC (1973-1975)
Michelle Zancarini-Fournel
In Mixité et coéducation, Clio Femmes, genre, histoire, n° 18, 2003
p. 241-252
Contraception et avortement : enjeux de luttes féministes À propos de : Bibia Pavard, Si je veux, quand je veux. Contraception et avortement dans la société française (1956-1979), Presses Universitaires de Rennes
Maud Gelly
Collège de France, La vie des idées, 2 janvier 2013
Quand la pratique fait mouvement. La méthode Karman dans les mobilisations pour l’avortement libre et gratuit (1972-1975)
Bibia Pavard
In Les femmes contestent. Genre, féminismes et mobilisations collectives, Sociétés contemporaines, 2012/1, n° 85, pp. 43-63
Le planning familial
Mouvement français pour le planning familial
Wikipedia
Audio. A quoi sert le Planning Familial ?
France inter, 16 décembre 2015, 50′
Contribution à l’histoire du Planning familial : le partenariat CFDT-MFPF au cours des années soixante-dix
Pascale Le Brouster
Genre & Histoire, n° 2, Printemps 2008
Les associations derrière la lutte pour légaliser l’IVG en France
Carenews INFO, 6 mars 2024
50 ans après le manifeste des 343, la lutte pour l’avortement libre et gratuit continue
Eva Fontenelle
Bondy blog, 5 avril 2021
Audio. Pourquoi le combat pour le droit à l’avortement ne s’est-il pas terminé avec la loi Veil ?
Sans oser le demander, France Culture, 27 décembre 2022, 58′
Avortement : un droit fondamental, toujours à défendre !
Cybèle David, Cécile Gondard Lalanne, Murielle Guilbert et Corinne Mélis
Les utopiques, n° 14, 2020
Simone Veil
Wikipédia
Vidéo. 1974 : Le discours de Simone Veil sur l’IVG à l’Assemblée Nationale
Archive INA, 38’19
Audio. Série « La rétro » : 1975 – Les 50 ans de la promulgation de la loi Veil sur l’avortement
Zoom zoom zen, France Inter, 17 janvier 2025, 50′
Audio. Simone Veil, le courage politique
Femmes d’exception, France Culture, 10 août 2024 (1ère diffusion 5 juillet 2024), 44′
Vidéo. Portrait en archives de Simone Veil, une humaniste engagée
Ina, 17 mars 2010 – Mis à jour le 13 mars 2024
L’émancipation des femmes sur la scène syndicale
Les femmes entrèrent lentement dans les syndicats. Salariées marginales, elles n’avaient pas intégré la culture du travail. Leurs compagnons n’y étaient pas favorables : ils rechignaient aux cotisations au temps perdu. Les femmes avaient mieux à faire qu’à aller à des réunions. Au début, leur prise de parole était même contrôlée : dans certains syndicats du nord de la France, elles devaient passer par un homme pour avoir l’autorisation d’intervenir. Le syndicalisme d’action directe, d’inspiration proudhonienne, est hostile au travail des femmes – un pis-aller – et teinté de virilisme. La mixité du syndicat le rendait difficile d’accès pour une honnête femme. C’est pourquoi le syndicalisme réussissait mieux quand il correspondait à un secteur d’emploi « féminin » comme les Tabacs ou Fleurs et Plumes. Un syndicalisme unisexe paraissait plus convenable, dans la lignée des « chambres des dames », mutuelles plus que syndicats, des années 1870-1880. C’est l’origine de la CFTC, devenue plus tard CFDT, dotée dès le départ d’une forte culture féminine. Jeannette Laot et Nicole Notat en sont issues. Entre CFDT et CGT ou FO, il y a deux généalogies différentes quant aux rapport de sexes. Le journal La Fronde de Marguerite Durand et Séverine soutenait les syndicats et les grèves de femmes. Mais ce soutien du « féminisme bourgeois » leur valut bien des critiques.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.

Conférence nationale de la CGT pour la défense des revendications et de l’organisation des travailleuses à Issy-les-Moulineaux,
les 15-16 février 1958
Affiche. Collection IHS-CGT
Héritière du syndicalisme chrétien, la CFDT, avec Jeannette Laot, évolue vers des positions féministes. Les commissions féminines ont un rôle important d’information, de pression et de formation. À la CGT, Marie Couette fonde la Commission féminine et obtient en 1946 la suppression de la loi qui permet l’abattement de 10 % sur les salaires féminins. La revue Antoinette, créée en 1955, témoigne de la vitalité du féminisme syndical.
Des militantes de la CGT – Christiane Gilles, Chantal Rogerat – , engagées dans les luttes du MLF, veulent faire entendre qu’il existe dans la société et au sein du syndicalisme une « question des femmes », notamment par le biais du mensuel féminin de la CGT, Antoinette, dont elles sont responsables. Leur action culmine au congrès de la CGT en 1977. Elles finiront par être licenciées et Antoinette devra se saborder. Entre femmes et syndicalisme persiste un malentendu, selon lequel les rapports de sexes sont secondaires et subordonnés aux rapports sociaux.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.

En dépit de ces restrictions, le syndicalisme a été pour nombre de femmes un lieu de solidarité, de sociabilité, d’ouverture au monde et de prise de responsabilités. Les congrès furent de véritables propédeutiques de la parole des femmes. Au célèbre congrès de Marseille (1879), Hubertine Auclert s’adressait aux ouvriers. Elle revendiquait la totale égalité des droits des deux sexes. Entre les deux guerres, les institutrices surtout développèrent un syndicalisme actif, très sensible aux revendications des femmes, y compris en matière de contrôle des naissances.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.
Voir aussi :
Le temps de militer, Carrière syndicale et disponibilité biographique des femmes et des hommes de la CFDT
Maxime Lescurieux, 2021
Paris : EHESS
En France, on estime à environ 11 % le taux de syndicalisation en 2017. Parmi l’ensemble des adhérent.e.s, les femmes représentent 36 %. Si nous assistons à une relative féminisation du tissu syndical sous l’impulsion de « l’espace de la cause des femmes », les femmes sont encore sous-représentées, tant en bas de la hiérarchie parmi les adhérentes, aux niveaux intermédiaires au sein des militantes sur les lieux de travail, qu’aux postes exécutifs des organisations syndicales. Bien qu’elles aient investi massivement le marché du travail salarié depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, les syndicats ont longtemps été réticents à s’ouvrir aux femmes, oscillant entre proclamations de leur droit au travail et renvoi des intéressées au foyer.
Syndicalisme et féminisme
Cécile Gondard-Lalanne ; Christian Mahieux
Les utopiques, n° 14, 2020
Ce numéro des utopiques résume l’importance de la contribution des femmes au mouvement syndical et féministe, ainsi que les défis persistants de l’invisibilité et de la discrimination genrée dans ces mouvements. Il met en lumière les contributions significatives des femmes syndicalistes dans divers domaines, de la lutte pour les droits des travailleurs à la lutte pour l’égalité des sexes.
Féminisme et syndicalisme. Je t’aime, moi non plus…
Annick Coupé
Les utopiques, n° 14, 2020
Travail invisible, grèves invisibilisées ?
Élisabeth Claude, avec la particpation de Nicole Savey
Les utopiques, n° 14, 2020
Le syndicalisme et sa dette historique avec la lutte des femmes
Nara Cladera
Les utopiques, n° 14, 2020
Vidéo. Visibiliser la lutte des femmes
Entretien avec Fanny Gallot
NPA – L’Anticapitaliste, Youtube, 22 avril 2024, 42’02
Audio. Syndicalisme au féminin : une nouvelle grammaire du pouvoir ?
Sous les radars, France Culture, 29 avril 2023, 29′

Gisèle Halimi (1927-2020) et Simone de Beauvoir (1908-1986) avec un dessin de Picasso. Djamila Boupacha, 1962 (réédition de 1978). Livre. Musée national Picasso-Paris. © Éditions Gallimard.
L’avocate Gisèle Halimi défend Djamila Boupacha, jeune militante engagée dans la lutte armée pour l’indépendance, arrêtée le 10 février 1960 à la suite d’un attentat manqué. Torturée et violée par des militaires français, son procès devient une tribune politique contre la guerre, la répression et les moyens d’action de l’État colonial. Il met aussi en exergue la participation des femmes dans les mouvements de résistance et la question du viol en temps de guerre.
Voir aussi :
Gisèle Halimi
Wikipédia
Vidéo. Qui était Gisèle Halimi ? Comprendre en trois minutes
Le Monde, 10 mars 2024
Gisèle Halimi, co-fondatrice de « Choisir la cause des femmes »
Choisir la cause des femmes
Audio. Gisèle Halimi, la cause des femmes
5 épisodes
À voix nue, France Culture, du 7 au 11 novembre, 28′ chacun
Audio. Gisèle Halimi, la révolutionnaire de la justice
Femmes d’exception, France Culture, 5 juillet 2024, 44′
Audio. Conférence publique de Gisèle Halimi en 1973 : la loi réprimant l’avortement est « une loi inacceptable »
Les Nuits de France Culture, France Culture, 15 septembre 2024, 1 10′
Audio. « Le procès de Bobigny »
Fictions / Théâtre et Cie, France Culture, 26 mai 2024, 1 57′
Voir aussi :
Djamila Boupacha
Wikipédia
(Dé)Politisation du genre et des questions sexuelles dans un procès politique en contexte colonial : le viol, le procès et l’affaire Djamila Boupacha (1960-1962)
Vanessa Codaccioni
NQF Vol. 29, n° 1, 2010, pp. 32-45
Audio. Série « Gisèle Halimi, la fauteuse de troubles » : Épisode 3/5 : Gisèle, Djamila, Simone, soeurs d’âme
Grance traversée, France Culture, 14 juillet 2021, 58′
Mai 68
En 1968, la contestation éclate dans les milieux étudiants, le monde du travail et de la culture. La grève générale transforme Paris en forum. Dans les assemblées générales, les manifestations, les affrontements de rue, les femmes sont partout.
Quelques réunions mixtes sur «les femmes et la révolution» ont lieu mais le sujet est périphérique. Les hommes occupent le devant de la scène médiatique, tandis que les femmes gèrent l’intendance. Un tract à l’Institut d’études politiques ironise à ce sujet : « L’efficacité de la grève serait sans aucun doute plus radicale si toutes les femmes refusaient de faire la cuisine et laissaient s’empiler la vaisselle comme s’empilent les ordures dans la rue […] Souhaitons que les filles de Sciences Po, […] abandonnent au plus tôt leur situation privilégiée de monopole dans leur confection des sandwiches et le service de balayage et de nettoyage de l’école ».

Tir première séance – deuxième séance shooting session, 1961.
Niki de Saint Phalle (1930-2002)
Tableau Relief – Donation de l’artiste
Collection Mamac, Nice Copyright Adagp, Paris, 2022
En pleine guerre d’Algérie, la plasticienne Niki de Saint Phalle s’arme d’un fusil. Le premier tir a lieu le 12 février 1961 devant des photographes et des artistes, impasse Ronsin à Montparnasse, où elle a son atelier. L’action consiste à tirer sur un support comportant des objets et des formes diverses en plâtre blanc qui libèrent de la peinture. « Un assassinat sans victime. J’ai tiré parce que j’aimais voir le tableau saigner et mourir. » L’une des cibles des Tirs représente son père, qui l’a violée alors qu’elle avait onze ans.
Voir aussi :
Niki de Saint Phalle
Wikipédia
Niki de Saint Phalle
AWARE
Podcast. Niki de Saint Phalle
Les grandes dames de l’art, AWARE, 11 février 2021
Audio. « Niki de Saint Phalle, de la révolte à l’art », un récit
France Inter, 1er juillet 2016, 55′

Rue Réaumur, Paris, mai 1968, 1968
Henri Cartier-Bresson (1908-2004)
Photographie – Fondation Henri Cartier-Bresson, Paris
Voir aussi :
Le genre dans les années 68
Michelle Zancarini-Fournel
EHNE (Encyclopédie d’histoire numérique de l’Europe)
Mai 68, mouvement précurseur de l’émancipation des femmes
L’Express, 5 avril 2018
Mai 68 : des femmes dans les rues, mais privées de parole publique
Le Monde, 7 mai 2018 (Abonné.e.s)
Vidéo. Mai 68, moment clé de l’émancipation féminine ?
FRANCE 24, 11 mai 2018, Youtube, 12’10
Vidéo. Mai 1968 : les femmes toujours dans l’ombre des hommes
France Info, 5 mai 2018, 2′ 56
Le temps du mouvement de libération des femmes (1970-2000)
(Source : Parisiennes citoyennes ! Engagements pour l’émancipation des femmes (1789-2000)
Dans l’onde de choc des espérances révolutionnaires des années 1968, le féminisme resurgit, métamorphosé. Le Mouvement de libération des femmes (MLF) se forme en 1970 et fait de la liberté de disposer de son corps un enjeu central. Paris accueille de vastes manifestations jusqu’à la confirmation, en 1979, de la loi Veil qui autorise l’interruption volontaire de grossesse.
Les mobilisations sont diverses et inédites : lesbiennes, femmes de ménage, femmes prostituées, femmes noires, femmes immigrées… La domination masculine dans le milieu culturel et intellectuel parisien est dénoncée, le statut des femmes réduites à des objets de fantasme critiqué.
Les mouvements de femmes se transforment à la fin du siècle. La création féminine s’impose dans les rues de Paris, car s’émanciper c’est aussi se donner le droit d’occuper l’espace public pensé par et pour les hommes. Mais les inégalités entre femmes et hommes demeurent importantes dans de nombreux domaines. Ainsi, sur la scène politique les femmes restent sous-représentées, ce qui justifie la campagne pour la parité concrétisée par une loi en 2000.
Voir aussi :
Anne Zelensky
Wikipédia
Jacqueline Feldman
Wikipédia
Audio. Christine Delphy
10 épisodes
A voix nue, France Culture, du 11 décembre au 15 janvier 2019, 29′ chacun
Audio. Série. « La Nuit des féminismes 2/2 : Voix du MLF » : Épisode 7/9 : Cathy Bernheim : « La naissance du MLF, c’est le 26 août 1970, avec le dépôt de la gerbe à la femme du soldat inconnu, sous l’Arc de triomphe »
Les nuits de France Culture, France Culture, 22 janvier 2022 (1ère diffusion 14 février 2021), 54′
Audio. Thérèse Clerc (1927-2016), bâtisseuse d’utopies
Toute une vie, France Culture, 24 juin 2023, 57′
Audio. Claudine Monteil, dans le sillage de Simone de Beauvoir
5 épisodes
À voix nue, France Culture, 6 au 9 mars 2023, 29′ chacun
Audio. Delphine Seyrig (1932-1990) : Vie, vidéo et combat
Toute une vie, France Culture, 10 juillet 2022, 58′
1970-2010 : QUARANTE ANS DE PRATIQUES FÉMINISTES EN ÎLE-DE-FRANCE
Paris, 5 juin 2010, 9h00-17h45
Auditorium de la Grande Galerie de l’évolution, 36 rue Geoffroy Saint Hilaire
Jardin des Plantes, M° Austerlitz, Monge, Censier ou Jussieu
Colloque organisé par Françoise Flamant, Éliane Viennot, Joëlle Wiels & Anne Zelensky
Militantes

Le Mouvement de libération des femmes (MLF), né en 1970, est un mouvement féministe non mixte et autogéré : toutes les participantes, et non quelques porte-paroles, ont le pouvoir de décision. Le projet révolutionnaire du MLF est d’aboutir à l’égalité de tous les droits. Les actions des militantes sont souvent provocatrices et médiatiques, par exemple le dépôt sous l’Arc de Triomphe de fleurs pour la tombe su Soldat inconnu. En 1974, le MLF publie un texte signé par 343 femmes osant déclarer avoir avorté, alors que cela est encore interdit et puni par la loi.
Voir aussi :
Manifeste des 343
Wikipedia
Manifeste des 343 : c’était il y a cinquante ans. Du Deuxième Sexe de Simone de Beauvoir au Manifeste des 343, paru le 5 avril 1971 dans Le Nouvel Observateur, Un même objectif : Briser le silence sur l’avortement et changer la loi inhumaine
Témoignage de Claudine Monteil. Présentation de Bibia Pavard
Assemblée Nationale, 2021

Le torchon brûle, menstrue/ n°1, 1971.
Mouvement de libération des femmes (MLF)
Revue. Archives Recherches Cultures Lesbiennes
Voir aussi :
Histoire du Torchon brûle
Marine Gilis, Barbara Meazzi et Nadja Ringart
Féminismes En Revue
Le MLF : une révolution symbolique
Le MLF est non mixte et autogéré. Il veut porter la voix de toutes, mais, très vite, des personnalités comme Beauvoir, des journalistes, des avocates, des écrivaines, des sociologues incarnent dans l’opinion le nouveau féminisme. Des associations, comme Choisir la cause des femmes ou la Ligue du droit des femmes, représentent une partie du mouvement.
Rapidement des symboles s’imposent.
Le poing levé, symbole des luttes sociales, est fusionné par les féministes avec le signe de Vénus. Le nouveau symbole international du féminisme est présent sur la première affiche d’un meeting sur la libération des femmes à l’université de Vincennes, le 21 mai 1970, et sur la couverture de Partisans, trois mois plus tard. Il est repris par Yvette Roudy au ministère des Droits de la femme en 1981.
Ces mains dessinent une vulve. Alternative au poing levé, symbole phallique, le geste en forme de losange est repris dans les manifestations féministes.

Esther Ferrer. Série : Mains Féministes
Photo noir et blanc à partir d’un rayogramme de 1977 – N° série: 2/9C – 1977/2005 – Tirage 2012. Collection privée Esther Ferrer

6 oct 1979 : Marche des femmes, Groupe de femmes assises faisant le signe « féministe », 1979
Pierre Michaud
© Pierre Michaud / Gamma Rapho
Voir aussi :
Mouvement de libération des femmes
Wikipedia
Le MLF, histoire d’un combat féministe
La rédaction de l’INA, 18 août2015 – Mis à jour le 26 août 2020
INA
La naissance du MLF : “Il y a encore plus inconnu que le Soldat inconnu, sa femme”
Alisonne Sinard
France Culture, 20 janvier 2017
Audio. Le MLF : Chronique d’une lutte féministe
Anne-Cécile Mailfert, présidente de la Fondation des Femmes et ancienne porte-parole du mouvement Osez le féminisme !
Affaires sensibles, France inter, 27 novembre 2017, 54′
Été 1970 : la révolution MLF
Christine Bard
L’Histoire, n° 352, avril 2010
« Notre corps nous appartient »
Les problèmes de la contraception et de l’avortement sont au cœur des luttes du MLF des années 1970. Tandis que progressait la science (en 1956, le médecin américain Pincus met au point la pilule), un assouplissement s’opérait, grâce à une partie du corps médical, à l’influence de la franc-maçonnerie et aux progrès du libéralisme. La loi Neuwirth, en 1967, légalisa les contraceptifs. La loi Veil (1975) votée avec la gauche contre une partie des députés de droite légalisa l’interruption volontaire de grossesse. Simone Veil eut beaucoup de courage.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.
La lutte pour la liberté de l’avortement prend son essor à Paris en 1971. Christine Delphy, Anne Zelensky, avec d’autres militantes du tout nouveau MLF publient le Manifeste des 343 femmes dans Le Nouvel Observateur. Les signataires déclarent avoir avorté. Parmi elles, Stéphane Audran, Colette Audry, Françoise d’Eaubonne, Catherine Deneuve, Marguerite Duras, Françoise Fabian, Brigitte Fontaine, Antoinette Fouque, Bernadette Lafont, Violette Leduc, Ariane Mnouchkine, Jeanne Moreau, Bulle Ogier, Marie-France Pisier, Micheline Presle, Christiane Rochefort, Yvette Roudy, Françoise Sagan, Delphine Seyrig, Nadine Trintignant, Agnès Varda, Marina Vlady, Monique Wittig. Gisèle Halimi, avocate et fondatrice de l’association « Choisir la cause des femmes », qui a également signé, est prête à intervenir en cas de procès.
C’est le coup d’envoi d’une lutte multiforme pour le droit de maîtriser sa fécondité.
« Un enfant si je veux, quand je veux, comme je veux » : la conquête de la liberté de contraception et plus encore du droit à l’avortement n’avait rien d’évident. Ils constituent le fondement d’un habeas corpus pour les femmes. Une révolution aux conséquences déterminantes sur les rapports de sexes. Peut-être le plus grand événement dans leur histoire contemporaine. Susceptible de « dissoudre la hiérarchie » du masculin et du féminin, qui paraissait pourtant une structure symbolique immobile et universelle.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.



« C’est tout de même plus chouette de vivre quand on est désiré : avortement et contraception libres et gratuits », 1973
Mouvement pour la liberté de l’avortement et de la contraception (MLAC)
Mona Thomas (née en 1952), dessinatrice
Imprimerie Germinal. Affiche. Ville de Paris / Bibliothèque Marguerite Durand
Le bébé hilare dessiné par Mona Thomas paraît en 1971 dans le premier numéro du « menstruel » puis est repris sur des affiches. Le MLAC est une mosaïque de membres Individuels (environ 15 000), de militantes du MLF, de médecins signataires de l’Appel des 331 du 5 février 1973 en faveur de la liberté de l’avortement, de membres du Planning familial, du GIS (Groupe information santé), de la CFDT, du PS et du PSU. La gestion de l’association, créée le 4 avril 1973, est confiée à l’avocate Monique Antoine.



Et les Gouines rouges sont arrivées…
Les homosexuelles sont omniprésentes sur la scène féministe. Participer au mouvement des femmes répare un sentiment d’exclusion : l’homosexualité est alors stigmatisée et considérée comme une maladie mentale. Mais les préjugés existent aussi à l’intérieur du mouvement féministe.
En 1971 naît le premier groupe lesbien, les Gouines rouges, en même temps que le Front homosexuel d’action révolutionnaire (FHAR) qui se réunit aux Beaux-Arts et à Vincennes, en rupture avec la modération de la seule association homosexuelle jusque-là existante, Arcadie. À partir de 1975, d’autres collectifs se forment comme le Groupe des lesbiennes féministes, puis le Groupe des lesbiennes de Paris, non sans tensions avec le féminisme. Un mouvement autonome lesbien est en gestation, la «visibilité lesbienne» sera le mot d’ordre des années 1980.

«Marche nationale des homosexuels et lesbiennes, Paris, samedi 19 juin», 1982. Comité d’urgence anti-répression homosexuelle (CUARH)
Affiche. Ville de Paris / Bibliothèque Marguerite Durand

« Lesbienne rencontre lesbienne – les 21 et 22 juin à Paris […] – groupe lesbiennes de Jussieu », 1980
Voir aussi :
Les Gouines rouges
Wikipédia
Le gai activisme des Gouines rouges
Le Monde, 13 août 2022 (Abonné.e.s)
« Toutes des lesbiennes ! »
Christine Bard
In Féminismes, 150 ans d’idées reçues, Christine Bard, Idées reçues, 2023. Le Cavalier Bleu, 360 pages, pp. 129-136

Monique Wittig et Nicole Lise Bernheim lors de la commémoration des femmes de la Commune. Issy-les-Moulineaux, 1971
Catherine Deudon (née en 1940)
Photographie Copyright Catherine Deudon / Bibliothèque Marguerite Durand
L’écrivaine Monique Wittig a contribué à la formation du Mouvement de libération des femmes. Elle participe à la création de groupes tels que les Petites marguerites (qui ont composé l’Hymne des femmes), les Gouines rouges et les Féministes révolutionnaires. Pour elles, le lesbianisme est une question centrale de cette libération : elle traduit cet enjeu sous une forme fictionnelle et théorique dans ses ouvrages.
Voir aussi :
Monique Wittig
Wikipédia
Monica Wittig – Site officiel
Renversements de Monique Wittig
Sara Garbagnoli ; Théo Mantion
Collège de France, La vie des idées, 24 septembre 2024
Monique Wittig, portrait d’une féministe radicale
Louise Coquillat
Philosophie Magazine, 3 mai 2024 (Abonné.e.s)
Audio. Avoir raison avec… Monique Wittig
5 épisodes
Avoir raison avec…, France Culture, 24 au 28 juillet 2023, 28′ chacun
Études wittigiennes / Wittig Studies. Lire, écrire, penser, agir : autour de l’œuvre de Monique Wittig
Contre le viol et les violences
La dénonciation des violences masculines prend une place centrale dans la nouvelle vague féministe. Elle rejoint en effet la lutte pour la liberté de disposer de son corps et le refus de toute fatalité biologique. Pour le MLF, il faut en finir avec le silence et la honte des victimes. Dès 1970, Emmanuèle Durand (Emmanuèle de Lesseps), dans le numéro de Partisans, raconte son expérience du viol.
Le besoin d’associations spécifiques se fait sentir. SOS Femmes alternatives, avec une ligne d’écoute, est créé en 1975 par la Ligue du droit des femmes. Puis le Collectif contre le viol et les violences sexistes est formé à Paris. En 1978, le Centre Flora-Tristan ouvre à Clichy. Allant dans le même sens, des livres paraissent, diffusant une analyse radicalement nouvelle du viol comme l’expression de rapports de pouvoir. Le 4 mars de la même année, des femmes organisent, pour la première fois à Paris, une manifestation nocturne pour revendiquer le droit de se promener en toute sécurité dans la ville la nuit.
Voir aussi :
Libération des femmes : année zéro. Fonder une légitimité de la parole politique et littéraire des femmes
Aurore Turbiau
Littératures engagées, 10 novembre 2019
Interdépendance du politique et du littéraire : exemple du texte “Le viol”
Comment le viol est devenu un crime
Séverine Liatard
L’Histoire, mensuel 470, avril 2020
Les associations de prévention et de lutte contre les violences sexistes et sexuelles
Le Centre Flora Tristan

Elles en ont assez d’être violées, humiliées, réduites en objets, elles attaquent Détective, décembre 1978. Anonyme. Affiche. Archives Recherches Cultures Lesbiennes.
Détective, journal populaire diffusé à 300 000 exemplaires, a l’habitude de titrer sur des « faits divers » liés aux violences sexuelles, dans des affiches très reconnaissables. Des féministes ont l’idée de les détourner en collant ce visuel sur mille d’entre elles, retournant le message du journal. Un collectif de femmes contre Détective se constitue et organise une manifestation contre la presse sexiste.
« D’ici et d’ailleurs » : femmes exilées, femmes immigrées, femmes noires
En 1976, une dizaine de femmes africaines, antillaises et afro-américaines créent la Coordination des femmes noires, à l’intersection de deux grandes causes. La première Journée des femmes noires a lieu le 29 octobre 1977. En 1978, Awa Thiam fonde le Mouvement des femmes noires. Le « féminisme noir », qui concerne à Paris des femmes d’origines très diverses, perce difficilement.
L’organisation des femmes racisées est facilitée après 1981 par le droit reconnu aux personnes immigrées de se réunir en association loi 1901. Le nombre d’associations tenues par et pour des femmes étrangères, le plus souvent maghrébines, explose. En 1988, elles sont 48 en Île-de-France. Au premier plan, la satisfaction de demandes économiques, sociales, culturelles.
En 1984, un Collectif féministe contre le racisme se forme à Paris.
Femmes immigrées

Dans les années 1960 et 1970, les femmes immigrées se rassemblent lors de manifestations et au sein d’associations pour défendre leurs droits. Elles dénoncent les discriminations racistes et sexistes qu’elles subissent. Les femmes algériennes protestent contre la condition des femmes dans leur pays d’origine. Celles originaires d’Espagne et du Portugal, qui travaillent souvent dans les services domestiques (ménages ou garde d’enfants), militent contre la précarité et les salaires très bas. Elles revendiquent la limitation de la journée de travail à neuf heures et le bénéfice de la Sécurité sociale.
Manifestation organisée par un collectif de femmes étrangères,
1er juillet 1978
Francine Bajande
Photographie copyright Francine Bajande

Malgré la révolution qu’a été la participation féminine à la guerre d’indépendance, l’Algérie ne respecte pas le droit des femmes à disposer d’elles-mêmes. C’est le constat amer que font les féministes algériennes à Paris qui critiquent la situation politique dans leur pays d’origine : une révolution trahie, un régime non démocratique et un Code de la famille inspiré par une morale religieuse traditionaliste. Organisée de manière autonome, la manifestation parisienne du 1er juillet 1978 exprime cette colère.

« Les Nanas beurs », vers 1995
ACID
Affiche. Archives Recherches Cultures Lesbiennes
La Marche pour l’égalité et contre le racisme, dite marche des Beurs se déroule du 15 octobre au 3 décembre 1983. Dans son sillage, de nombreuses associations de jeunes issus de l’immigration se constituent. Les Nanas beurs, réunissant des jeunes femmes féministes issues de l’immigration, sont une de ces nouvelles associations, fondée en 1985 å Boulogne-Billancourt par Souad Benani, d’origine marocaine et venue étudier la philosophie å Paris.

Voir aussi :
Femmes et militantisme dans les années 1970 en France. Le cas du journal portugais O Alarme!..
Sónia Ferreira
Hommes & migrations, n° 1341, 2023, pp. 47-55
De l’invisibilité à la valorisation de l’engagement. Les femmes dans les recherches sur l’immigration en France (1970-2020)
Linda Guerry
Hommes & Migrations, 2020/4, n° 1331, pp. 17-23
Les oubliés de la politique française de l’immigration : les femmes immigrées et les enfants d’immigrés
Jacqueline Costa-Lascoux
Hommes et Terres du Nord, 1981 H-S 2 pp. 571-591. Fait partie d’un numéro thématique : Migrations internes et externes en Europe Occidentale. Tome 2
Les enjeux de visibilité et de représentation des femmes dans les mobilisations des héritiers de l’immigration
Foued Nasri
La marche de 1983, édité par Samir Hadj-Belgacem et Foued Nasri, Presses universitaires de Paris Nanterre, 2018, pp. 229-241
Les mobilisations de travailleuses

La réduction des inégalités sexuées dans le monde du travail est depuis 1965 un objectif étatique : un Comité du travail féminin est piloté par la gaulliste Marcelle Devaud, puis, en 1974, un secrétariat à la Condition féminine est confié à Françoise Giroud ; en 1983, la loi Roudy porte sur l’égalité professionnelle. D’autres lois suivront, manifestement insuffisantes et mal appliquées. D’innombrables manifestations indépendantes, syndicales et/ou féministes de travailleuses le rappellent. Au bas de l’échelle, les employées de maison vont se mobiliser pour limiter leur journée de travail à 9 heures à la place de 12. Les infirmières s’insurgent régulièrement contre l’invisibilité, le manque de reconnaissance, la faiblesse structurelle de leurs salaires, dans une profession féminine à 80 % et peu syndicalisée.
Malgré quelques avancées, les métiers féminins restent sous-rémunérés.
Voir aussi :
Droits des femmes : où en est l’égalité professionnelle ?
Vie publique, 28 février 2024
Dans le monde du travail, les inégalités femmes-hommes ont la vie dure
Oxfam, 15 février 2023
Les inégalités de salaires entre les femmes et les hommes : état des lieux
Observatoire des inégalités, 22 janvier 2023
Dans le chapitre dédié au travail des femmes, Michelle Perrot évoque les domestiques. A la veille de 1914, le travail ménager est le principal secteur d’emploi des femmes; Mais les domestiques ne sont pas des salariées comme les autres. Nourries, logées, elles reçoivent des « gages » qui leur sont versés irrégulièrement. Leur journée est quasi illimitée. Le dimanche n’est pas garanti, même si la pratique s’en développe.
Il y a bien des variétés de domestiques : cuisinières, femmes de chambre, lingères, filles de cuisine, bonnes à tout faire n’ont pas le même statut, ni les mêmes gages. Les premières s’en sortent bien. Les dernières beaucoup moins. La condition domestique mène à la perdition ou à l’ascension. Après 1914, les domestiques se raréfient. S’ouvrent d’autres possibilités de gagner sa vie dans les hôpitaux laïcisés, qui recrutent, et les usines, plus accueillantes et mieux protégées par le droit du travail naissant.
Les « bonnes » disparaissent, au profit des femmes de ménage, souvent recrutées parmi les immigrées, espagnoles, portugaises, puis africaines et asiatiques.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.

Toujours dans le chapitre dédié au travail des femmes, Michelle Perrot parle des infirmières. Dans les années 1880, le docteur Bourneville entreprend la laïcisation des hôpitaux parisiens. Il opte pour le modèle des filles de salle, peu qualifiées, auxiliaires des médecins. Mal payées, jeunes, célibataires, elles sont astreintes au logement sur place et surveillées. De nombreuses Bretonnes s’embauchèrent, préférant le service domestique à l’hôpital plutôt que dans les familles bourgeoises. Par la suite se développa un enseignement infirmier libre, dans les écoles privées, notamment sous l’impulsion de protestantes qui s’inspiraient de Florence Nightingale. Ainsi à l’école infirmière de Bordeaux. Il fallait obtenir une formation et des diplômes, clef de qualifications reconnues et de meilleurs salaires ; passer du service domestique à un métier véritable, alliant connaissances médicales et savoirs du corps.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.

« Vivre comme les autres femmes », vers 1975
Cabu (1938-2015)
Affiche. Collection Dixmier
Cette affiche de Cabu le souligne à juste titre : de nombreuses prostituées craignent d’être séparées de leurs enfants, confiés à la Direction départementale des affaires sanitaires et sociales. Le 18 novembre 1975, à la Mutualité, deux prostituées, Ulla et Sonia, organisent des Assises nationales de la prostitution, où les prostituées peuvent enfin s’exprimer publiquement. Malgré la constitution d’une Association nationale d’action et de défense des femmes prostituées, le mouvement ne parvient pas à s’inscrire dans la durée.
Voir aussi :
Occupation de l’église Saint-Nizier par les prostituées lyonnaises
Wikipédia
Une mobilisation improbable : l’occupation de l’église Saint-Nizier par les prostituées lyonnaises
Lilian Mathieu
Revue française de sociologie, 1999, n° 40-3, pp. 475-499
Audio. La révolte des prostituées de Saint-Nizier
Sur les docks | 14-15, France Culture, 1er juin 2015, 52′
Le quotidien des prostituées
Le Quotidien des femmes, 1975, n° 8, p. 3
Sonia à Paris, prépare la réunion du 18 novembre à la mutualité
Assises nationales de la prostitution le 18 novembre à 19 h 30 à la mutualité
Réglementer la prostitution XIXe-XXIe siècles
Yannick Ripa
EHNE (Encyclopédie d’histoire numérique de l’Europe)
Quand les féministes se déchirent sur la prostitution (1/2) : les arguments réglementaristes
Samuel Lacroix
Philosophie Magazine, 31 mars 2022 (Abonné.e.s)
L’abolitionnisme prostitutionnel
Yannick Ripa
EHNE (Encyclopédie d’histoire numérique de l’Europe)
Samuel Lacroix
Quand les féministes se déchirent sur la prostitution (2/2) : les arguments abolitionnistes
Philosophie Magazine, 31 mars 2022 (Abonné.e.s)
Prostituées et féministes en 1975 et 2002 : l’impossible reconduction d’une alliance
Lilian Mathieu
Travail, genre et sociétés, 2003/2, n° 10, pp. 31-48
Dans les années 1975, les féministes apportent leur soutien aux mouvements de prostituées. Mais cette fois, celles-ci prennent leur sort en main. Elles demandent la reconnaissance de leur profession, et par conséquent les garanties de la sécurité sociale. Ce qui heurte les abolitionnistes comme l’acceptation de l’inacceptable.
Aujourd’hui, les féministes sont toujours divisées entre celles qui voient dans la prostitution la suprême aliénation du corps des femmes, et refusent de la considérer comme un métier, et celles qui défendent le droit des femmes à disposer de leurs corps et donc de le vendre.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.

« Le plan des patrons c’est : nous isoler, nous diviser,
nous faire payer leur crise ». Femmes en lutte, 13e
Affiche. Ville de Paris / Bibliothèque Marguerite Durand

Si les travaux ménagers proprement dits se sont amenuisés, les enfants – leur santé, leurs études, leurs distractions – les ont remplacés. Si bien que le domestique pèse toujours d’un poids équivalent dans l’emploi du temps des femmes. Sans que les hommes y interviennent beaucoup plus.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.
Voir aussi :
Paternité : organisation des temps professionnels et familiaux deux ans après la naissance d’un enfant
Sous la direction de Marie-Clémence Le Pape (Université Lumière Lyon 2, DREES), avec l’équipe de Paternage Marta Dominguez-Folgueras (Sciences Po), Hélène Guedj (DREES), Ariane Pailhé (Ined), Alix Sponton (Ined, Sciences Po), Bérangère Véron (AgroParisTech) et Pauline Virot (DREES)
Les dossiers de la DREES, N° 126, 23 janvier 2025
L’articulation entre vies familiale et professionnelle repose toujours fortement sur les mères
Litti ESTEBAN (DREES)
Études et résultats, N° 1298, 5 mars 2024
Exister dans les assemblées élues
Dans les années 1970, les femmes sont quasi absentes de la vie politique française. Le MLF n’y change rien. En revanche, son existence stimule la révolte au sein des partis politiques.
L’alternance politique de 1974 ouvre la voie à une forme de « récupération » du féminisme par le pouvoir. La féminisation des gouvernements progresse légèrement. Françoise Giroud, la cofondatrice de L’Express, est nommée secrétaire d’État à la Condition féminine. Elle propose « 110 mesures pour les femmes » mais peu seront mises en œuvre.
La même année, Arlette Laguiller se déclare « candidate à la présidence de cette République d’hommes ». Elle est la première à le faire légalement. Si le pouvoir reste masculin, le taux de féminisation de la vie politique parisienne est largement supérieur à celui du reste de la France.
Voir aussi :
Le tableau de bord de la place des femmes en politique
Observatoire des inégalités, 14 novembre 2024
Lois pour la parité politique : un dispositif contraignant, des résultats contrastés
Vie publique, 6 mars 2024
Représentation politique
In Femmes et hommes, l’égalité en question, INSEE, Édition 2022
Cultures féministes

Un militantisme spécifique au monde de la recherche se développe dans les années 1980 avec la création de l’Association parisienne des études féministes, qui devient association nationale, animée par Françoise Picq. Avec, parfois, le soutien de l’État, ce nouveau champ de recherche s’institutionnalise progressivement, malgré de fortes résistances. Sont interrogées toutes les dimensions de la condition féminine, en particulier en histoire et en sociologie.
Dans les années 1980, des revendications féministes émergent dans les milieux artistiques, autour de figures d’artistes fédératrices, qui tentent de réduire l’omniprésence masculine.
À partir des années 1990, le concept de genre se diffuse, désignant la construction sociale du féminin et du masculin. À la toute fin du 20e siècle, les approches queer invitent à déconstruire les normes et à s’intéresser aux transgressions de genre.
Voir aussi :
ANEF (Association nationale des études féministes)
Qu’est-ce que le genre ? Petit précis d’une notion large
Bruno Saintôt
Revue Projet, 2019/1, n° 368, pp. 13-20
Transgression de genre
Wikipédia
Désordres de genre : déviances, transgressions, subversions
Hammou, Karim, et Hyacinthe Ravet
In Sexe et genre des mondes culturels, édité par Sylvie Octobre et Frédérique Patureau, ENS Éditions, 2020
Vidéo. Série « LGBT+, une histoire queer » : Épisode 1/4 : D’un genre à l’autre, une histoire de transgressions ?
Le Cours de l’histoire, France Culture, 19 juin 2023, 59′
« Femmage »

En référence au terme « hommage le « femmage » est un mot employé pour désigner la célébration de la mémoire des femmes par un acte de reconnaissance : cérémonie nationale, statue, nom de rue ou de station de métro, panthéonisation, etc. Mais ces actes ne suffisent pas. Il faut écrire et raconter l’histoire des femmes dans des œuvres, des expositions, des livres et les manuels scolaires. Les femmes ont fait l’histoire. Elles ont milité, écrit, agi, parfois avec une certaine violence, pour obtenir la citoyenneté et des droits. C’est leur rendre justice que de les inclure dans une histoire qui serait vraiment mixte.

Librairie des femmes
L’avenir graphique
Affiche. Ville de Paris / Bibliothèque Marguerite Durand
Inaugurée en 1974, la Librairie des femmes s’installe 68, rue des Saints-Pères (7e arr.). En 1980, elle est transférée 74, rue de Seine (6e arr.) et associée à une galerie. Dix-neuf ans plus tard, elle s’installe à son emplacement actuel, 33, rue Jacob (6e arr.). Lié aux éditions Des femmes, créées en 1972 par Antoinette Fouque (du groupe Psychanalyse et politique du MLF), le catalogue compte des titres essentiels à la culture féministe : essais, fictions et livres audio (la « Bibliothèque des voix », pionnière en Europe).
Voir aussi :
Antoinette Fouque, une vie pour l’expression des femmes
Librairie des femmes
Éditions Des femmes
Wikipédia
Audio. L’histoire des éditions des femmes-Antoinette Fouque : 50 ans d’engagement, de création et de pensée
Les rendez-vous de l’histoire, 12 octobre 2024, 1 26′ 36
Bibliothèque Marguerite Durand
Constituer des archives de femmes permet de lutter contre la dispersion et l’oubli. Une anecdote : « Marie-Louise Bouglé, modeste employée, amie de Marguerite Durand, fondatrice de La Fronde, avait entrepris de réunir textes, tracts, affiches, lettres, objets émanant du féminisme contemporain, qu’elle rachetait souvent chez les bouquinistes. Elle destinait ce fond à la bibliothèque Marguerite-Durand. Après sa mort, son mari, saisi par la Seconde Guerre mondiale, déposa l’ensemble à la Bibliothèque nationale, avec la complicité de son administrateur, Julien Cain. Il mourut à son tour. Tout le monde avait oublié ce dépôt, redécouvert dans les années 1970, transporté à la Bibliothèque historique de la Ville de Paris, classé tardivement par une historienne, Maïté Albistur, et, grâce à elle, consultable.
Pour éviter de telles vicissitudes, Christine Bard a organisé, à Angers, en 2000, dans le cadre de la Bibliothèque universitaire et par convention, les « Archives du féminisme ». Elles recèlent d’ores et déjà plusieurs fonds importants. Ils émanent de Cécile Brunschvig (1877-1946), féministe au sein du parti radical, une des trois sous-secrétaires d’État nommes par Léon Blum dans le gouvernement de Front populaire (à une époque où les femmes n’avaient pas le droit de vote), supporter de toutes les causes des femmes, créé en 1901, la plus anciennes des associations féministes françaises ; d’Yvette Roudy, ancienne ministre socialiste des Droits des femmes ; de Suzanne Képès (1918-2005), grande figure du Planning familial. De bien d’autres encore ! »
Des archives de femmes pour une histoire des femmes.
Source : Michelle Perrot « Mon histoire des femmes », Points Histoire, Histoire, 2008, 256 p.

Fondée en 1932 à partir des collections de Marguerite Durand, cette bibliothèque parisienne documente le féminisme, mais aussi l’histoire des femmes et de leur place dans la société. Elle s’intéresse à présent également aux questions concernant le genre.
Riche de 45 000 ouvrages, dont des éditions rares et originales d’œuvres littéraires écrites par des femmes depuis le 17e siècle, elle conserve aussi la quasi-totalité des périodiques féminins et féministes des 19e et 20e siècles. 4500 lettres et manuscrits de femmes, pour la plupart inédits, ainsi que des images et des objets féministes de toutes époques viennent compléter ces collections.
Elle est partenaire du Centre des archives du féminisme d’Angers et est le principal prêteur de cette exposition.
Voir aussi :
Bibliothèque Marguerite-Durand
Wikipédia
Bibliothèque Marguerite Durand : présentation
Annie Metz
Les archives du féminisme
Sans archives, pas d’histoire : il y a un siècle, des pionnières archivaient le féminisme comme une urgence
Chloé Leprince
France Culture, 22 novembre 2021
Hélène Cixous, université de Vincennes, 1975
Hervé Gloaguen (né en 1937)
Photographie copyright Hervé GLOAGUEN/GAMMA RAPHO

En 1969, l’écrivaine et spécialiste de littérature anglaise Hélène Cixous participe à la création du Centre universitaire expérimental de Vincennes. C’est un tournant intellectuel et pédagogique, comme en témoigne cette photographie où les distances spatiales entre la professeure et son public sont abolies. En 1969, l’écrivaine et spécialiste de littérature anglaise Hélène Cixous participe à la création du Centre universitaire expérimental de Vincennes. C’est un tournant intellectuel et pédagogique, comme en témoigne cette photographie où les distances spatiales entre la professeure et son public sont abolies. En 1969, l’écrivaine et spécialiste de littérature anglaise Hélène Cixous participe à la création du Centre universitaire expérimental de Vincennes. C’est un tournant intellectuel et pédagogique, comme en témoigne cette photographie où les distances spatiales entre la professeure et son public sont abolies.
Voir aussi :
Hélène Cixous
Wikipédia
HÉLÈNE CIXOUS : bibliographie sélective
Bnf, octobre 2021
Audio. Hélène Cixous, l’écriture de l’exil
5 épisodes
Les Nuits de France Culture, France Culture, 14 novembre 2023 et 17 décembre 2023, 28′ chacun
Audio : Série « Ces figures qui ont façonné l’université » : Épisode 4/4 : L’université buissonnière, l’expérience de Vincennes
Le Cours de l’histoire, France Culture, 21 janvier 2021, 51′

Yves Saint Laurent, Paris, 1975, pour Vogue Paris
Helmut Newton (1920-2004)
Photographie. Collection Maison européenne de la photographie, Paris
Avec sa main dans la poche, sa façon de tenir sa cigarette, ses cheveux gominés, l’effacement de sa poitrine, la modèle et actrice danoise Vibeke Knudsen ressemble aux garçonnes des Années folles. La jeune femme porte un costume-pantalon à fines rayures avec une blouse à col noué. Le smoking féminin d’Yves Saint Laurent est créé en 1966 ; sa version prêt-à-porter est vendue dans la boutique de la rue de Tournon (6e arr.). Il est un des symboles de la révolution des mœurs.
Ensemble du soir complet ayant été porté par Juliette Gréco, vers 1986
Sonia Rykiel (1930-2016)
Costume – Palais Galliera-musée de la Mode de la Ville de Paris
La couturière Sonia Rykiel ouvre en 1968 sa première boutique sur la rive gauche, rue de Grenelle (6è arr.) : un succès immédiat. Elle dessine des vêtements décontractés et confortables, qui s’adaptent aux femmes et non l’inverse, créant ainsi un style androgyne chic et élégant. Lors de ses défilés, les mannequins apparaissent joyeuses et épanouies dans des vêtements qui accompagnent naturellement leurs mouvements.
La reine du tricot « s’impose comme la féministe de la mode ».

Voir aussi :
Sonia Rykiel
Wikipédia
Audio. Sonia Rykiel
Françaises, Français, France Inter, 4 avril 2017, 2′
Artistes

Pour redevenir actrices dans le monde de l’art et dans la représentation des femmes, des artistes mettent leur corps en jeu dans leurs œuvres. Elles réalisent ainsi ce qu’on appelle des performances. En 1977, Orlan propose aux spectateurs deux représentations d’elle-même. Dans la première, elle est habillée à la manière d’une sainte, dans la seconde, elle s’est photographiée nue. Le public est invité à déposer un cierge à « Sainte ORLAN » ou à échanger un véritable baiser avec l’artiste, contre une pièce de 5 francs. Elle interroge ainsi le lien entre art et argent et les stéréotypes liés au sexe féminin.

Le Baiser de l’artiste. Le distributeur automatique ou presque ! n°2, 1977
ORLAN (née en 1947) Photographie. Collection Maison européenne de la photographie, MEP. © Adagp, Paris, 2022
En 1977, ORLAN réalise un happening féministe à l’entrée de la Foire internationale de l’art contemporain (FIAC), au Grand Palais. Pour dénoncer la marchandisation du corps des femmes et l’absence des femmes artistes dans cette manifestation, elle propose Le Baiser de l’artiste, embrassant les visiteurs qui le souhaitent pour 5 francs. La performance fait scandale, et l’artiste perd son emploi d’enseignante. Quelque temps plus tard, elle s’imposera comme l’inventrice de « l’art charnel ».
Voir aussi :
Orlan
Wikipédia
ORLAN
AWARE
Le “Baiser de l’artiste” d’ORLAN, un scandale d’art et d’argent
Delphine Peresan-Roudil
Beaux Arts, 15 mai 2023
Site officiel d’Orlan
« Dissolution Dans L’eau, Pont Marie – 17 Heures, 1978 », performance féministe du 11 mai 1978
Lea Lublin (1929-1999)
Photographies —Courtesy of Nicolas Lublin and gallery 1 Mira Madrid
Lea Lublin est une artiste performeuse féministe. En 1968, pour Mon Fils, elle déambule au musée d’Art moderne de la Ville de Paris avec son enfant de sept mois pour questionner le rôle familial des femmes. En 1978, dans Dissolution dans l’eau, réalisé chez une autre artiste féministe, Françoise Janicot inscrit sur une feuille des clichés misogynes, puis, en procession avec un groupe de femmes, les jette dans la Seine, chargée de les dissoudre.

Voir aussi :
Lea Lublin
Wikipédia
Lea Lublin
AWARE
Psycho-politique de l’espace public. Les questionnements de Lea Lublin (1929-1999)
Hélène Gheysens
Arts & Sociétés, n° 132
Lea Lublin, iconoclaste radicale
Hélène Gheysens
AWARE, 7 juillet 2018
Les Parcours de Léa Lublin
Hélène Gheysens
Mind Control, édité par Pascal Rousseau, Éditions de la Sorbonne, 2019, pp. 169-196

Mère et petite mère, 1970
Raymonde Arcier (née en 1939)
Sculpture en tissu —Collection de l’artiste
Raymonde Arcier travaille à Paris et étudie à Vincennes lorsqu’elle rencontre le MLF. Elle participe à l’aventure collective du journal Le torchon brûle. Les corvées domestiques, devenues un enjeu politique, l’inspirent particulièrement. Artiste autodidacte, plasticienne et poétesse, elle s’explique sur son art féministe en 1976 : « Je tiens à mes aiguilles, on aura du mal à me les arracher. Je veux parler à partir de mon héritage de femme, il me pèse et je ne peux le renier sans me renier moi-même. »
Voir aussi :
Raymonde Arcier
Wikipédia
Raymonde Arcier
AWARE
Raymonde Arcier, art et féminisme
Site de Raymonde Arcier
Zoé et Le Torchon brûle
Raymonde Arcier
Féminismes En Revue
Foire des femmes à la Cartoucherie de Vincennes, 16-17 juin 1973
William Karel (né en 1940)
Photographie. © William Karel / Gamma Rapho

Pourquoi une « foire des femmes » ? « Pour danser, chanter, jouer, aimer, toutes ensemble. Pour retrouver notre goût du jeu, enfoui, mutilé, colonisé. Pour une prise de parole collective, où l’art ne soit plus coupé de notre réalité de femmes en luttes. » Sur une estrade, des saynètes sont jouées, comme celle où Josy Thibaut et Christine Delphy réinterprètent Les Malheurs de Sophie, sous le regard bienveillant de Mère et petite mère, œuvre de Raymonde Arcier
Ariane Mnouchkine, prenant une représentation
du Songe d’une nuit d’été. Cirque Médrano, 1968
Martine Franck (1938-2012)
Photographie – Collection Maison européenne de la photographie, Paris

Ariane Mnouchkine crée le Théâtre du Soleil en 1964. C’est une expérience de gestion singulière pour une troupe de théâtre, la première coopérative dans ce milieu. Les décisions sont prises collectivement et les salaires identiques pour toutes et tous. La compagnie s’installe en 1970 à la Cartoucherie de Vincennes, et Ariane Mnouchkine devient alors une figure incontournable de la création théâtrale parisienne.
A voir aussi :
Ariane Mnouchkine
Wikipédia
Vidéo. Entretiens patrimoniaux. Passé composé, figures du siècle : Ariane Mnouchkine
Entretien mené par Emmanuel Laurentin
Ina, 4 54′ 39
Théâtre du soleil
Les féministes et l’espace public parisien

« C’est tout de même malheureux qu’on ne puisse pas se promener après 9 heures du soir », chantent en 1965 Les Parisiennes, quatuor yéyé. L’insécurité des femmes dans la rue est traitée sur un mode humoristique mais va bientôt devenir un enjeu politique. Les marches de nuit féministes appellent les femmes à agir. « Prendre la nuit », c’est rappeler que la ville appartient aussi aux femmes et qu’il n’est pas de véritable citoyenneté sans droit à la sécurité. Les cours de self-défense se multiplient d’ailleurs à partir des années 1970 dans la capitale.

Paris apparaît aussi comme une ville masculine en raison du sexisme en vitrine dans les commerces. En 1999, Mix-Cité s’en prend à un grand magasin qui a placé des mannequins vivants portant des sous-vêtements sexy en vitrine. La même année, Les Chiennes de garde s’en prennent au Fouquet’s, qui refuse les femmes « non accompagnées ».

Des masques des Chiennes de garde, 1999-2000
Centre des archives du féminisme, université d’Angers

Les Chiennes de garde devant le Fouquet’s, 1999
Joël Saget
Photographie. © Joel Saget/AFP
Le dimanche 7 novembre 1999 à 18 heures, deux femmes sont refusées au Fouquet’s. On leur explique que, comme l’indique une pancarte, «on ne sert pas les femmes seules». Elles portent plainte et s’adressent à l’association de Florence Montreynaud, Les Chiennes de garde, une toute nouvelle association qui lutte contre le sexisme visant les femmes dans la sphère publique.
Voir aussi :
Femmes, prenons la nuit ! Les marches de nuit contre les violences sexistes et sexuelles dans la seconde moitié des années 1970
L’Effet Marguerite, le Carnet de la bibliothèque Marguerite Durand, 15 septembre 2024
La marche internationale La rue, la nuit, femmes sans peur : ses origines et sa dynamique symbolique
Cécile Coderre et Sara-Maude Ivelyne Coderre
Volume 23, numéro 2, automne 2017, p. 141–180 [Militantisme et changement social. Partie 2]
Les Chiennes de garde
Wikipédia
Les chiennes de garde
« La poésie ébauche les contours d’une ville à colorier », 1992
Miss.Tic (1956-2022)
Palissade avec pochoir. Collection atelier Miss.Tic © Adagp, Paris, 2022

À partir de 1985, les pochoirs de l’artiste urbaine Miss.Tic enchantent les murs de Paris. Ses silhouettes féminines sexy en rouge et noir sont accompagnées d’aphorismes qui affirment son désir de jouir de la vie et d’exister dans l’espace urbain : « J’écris à hauteur d’homme ». Poétesse souvent désenchantée, Miss.Tic refuse les étiquettes, mais sa révolte lui inspire des formules ravageuses et politiques. « L’homme est le passé de la femme » et « Le masculin l’emporte, mais où ? ».
Voir aussi :
Miss.Tic
Wikipédia
Audio. Miss.Tic (1956 – 2022), l’art mur d’une poétesse
Toute une vie, France Culture, 25 novembre 2023, 1 01′
Sororité

La sororité, qui évoque les liens entre sœurs, est une notion importante pour les luttes féministes à travers l’histoire. Elle est présente dans ces collectifs que les femmes ont créés pour faire entendre leurs voix : clubs de la Révolution, institutions sportives, manifestations, associations, etc. Aujourd’hui, la sororité est l’alliance des femmes contre le sexisme dans les lois et au quotidien. C’est un outil de pouvoir qui propose aux femmes de s’unir et de se soutenir, quels que soient leur âge, leur orientation sexuelle, leur origine et leur milieu social.
Voir aussi :
Sororité (féminisme)
Wikipédia
Audio. Série « Fraternités, sororités » : Épisode 1/4 : Féminisme : la sororité est-elle vraiment possible ?
France Culture, 25 septembre 2023, 60′
La sororité, un appel qui vient de loin
Louise Coquillat
Philosophie Magazine, 20 mai 2024 (Abonné.e.s)
Audio. Série « Histoire des femmes, par Michelle Perrot » Épisode 1/10 : Écrire l’histoire des femmes : rompre le silence et représenter les femmes
France culture, 29 novembre 2022 (1ère diffusion 4 décembre 2021), 1 05′
Audio. Série « Histoire des femmes, par Michelle Perrot » Épisode 2/10 : Écrire l’histoire des femmes : sources et voix des femmes
France culture, 30 novembre 2022 (1ère diffusion 6 décembre 2021), 40′
Audio. Série « Histoire des femmes, par Michelle Perrot » Épisode 3/10 : Le corps des femmes : âges, cheveux et sexe
France culture, 1er décembre 2022 (1ère diffusion 11 décembre 2021), 59′
Audio. Série « Histoire des femmes, par Michelle Perrot » Épisode 4/10 : Le corps des femmes : maternité et corps assujetti
France culture, 2 décembre 2022 (1ère diffusion 13 décembre 2021), 44′
Audio. Série « Histoire des femmes, par Michelle Perrot » Épisode 5/10 : L’âme des femmes : religion, sorcellerie et savoir
France culture, 3 décembre 2022 (1ère diffusion 18 décembre 2021), 60′
Audio. Série « Histoire des femmes, par Michelle Perrot » Épisode 6/10 : L’âme des femmes : création et femmes artistes
France culture, 6 décembre 2022 (1ère diffusion 20 décembre 2021), 40′
Audio. Série « Histoire des femmes, par Michelle Perrot » Épisode 7/10 : Le travail des femmes : paysannes, travail domestique et ouvrières
France culture, 7 décembre 2022 (1ère diffusion 25 décembre 2021), 59′
Audio. Série « Histoire des femmes, par Michelle Perrot » Épisode 8/10 : Le travail des femmes : employées, institutrices, infirmières et actrices
France culture, 8 décembre 2022 (1ère diffusion 27 décembre 2021), 39′
Audio. Série « Histoire des femmes, par Michelle Perrot » Épisode 9/10 : Femmes dans la Cité : voyages, femmes dans le temps et actions collectives
France culture, 9 décembre 2022 (1ère diffusion 1er janvier 2022), 60′
Audio. Série « Histoire des femmes, par Michelle Perrot » Épisode 10/10 : Femmes dans la Cité : quel avenir pour le féminisme ?
France culture, 10 décembre 2022 (1ère diffusion 3 janvier 2022), 40′
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